Résumé Résumé
- YouTube comme colonne vertébrale financière
- Twitch : l’économie de la fidélisation
- Bump : la fabrique à contenus et profits
- GP Explorer : l’événementiel version start-up nation
- Diversification : de la musique au kombucha
- Les placements de produits : la vache à lait cachée
- Une montée en gamme
- Un patrimoine structuré comme une entreprise
Lucas Hauchard, alias Squeezie est le premier youtubeur français. À 29 ans, il est devenu l’illustration éclatante d’un capitalisme de l’attention intégralement réinventé à l’ère numérique. Il est également devenu un entrepreneur à la tête d’un groupe diversifié, rentable, et doté d’une vision stratégique claire. La sortie de sa vidéo « Stop the Train », au budget de 700 000 euros, cristallise cette transformation : celle d’un créateur devenu producteur, investisseur, marque et média à lui seul. Squeezie, c’est désormais une PME de l’influence qui pèse lourd, très lourd.
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Avec une audience massive (près de 20 millions d’abonnés), et une fortune estimée à une trentaine de millions d’euros, il ne s’agit plus de « combien gagne un youtubeur », mais de comment un nouvel écosystème économique se bâtit sur l’attention, la fidélité communautaire, et une industrialisation intelligente des contenus.
YouTube comme colonne vertébrale financière
À la base, un modèle robuste : la monétisation publicitaire sur YouTube. La chaîne principale de Squeezie cumule 11,3 milliards de vues. À raison d’un RPM moyen de 1,08 €, chaque million de vues rapporte environ 1 080 €, soit 4 000 € par vidéo quand celle-ci dépasse les 4 millions de vues — ce qui est fréquent.
Sur l’année 2025, les revenus YouTube mensuels varient entre 33 000 € et 54 000 € pour la chaîne principale. En y ajoutant les autres canaux — Squeezie Gaming, rediffusions Twitch —, les revenus mensuels oscillent entre 70 000 € et 110 000 €. YouTube reste le pilier, mais pas le tout.
Le modèle repose sur une logique de multi-chaînes, fragmentant les publics pour mieux les cibler et optimiser les flux publicitaires. C’est la logique industrielle du streaming : plus de chaînes, plus de niches, plus de rentabilité.
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Twitch : l’économie de la fidélisation
Sur Twitch, Squeezie mobilise 5,5 millions de followers, mais une base d’abonnés payants bien plus modeste : 4 738 en rythme de croisière, générant entre 7 000 € et 11 000 € mensuels. Loin derrière YouTube, certes, mais Twitch devient un levier exceptionnel lors des événements.
Lors du GP Explorer 2022, un pic de 33 983 abonnements est enregistré en une journée, générant 67 000 €. En 2023, 1,35 million de spectateurs simultanés. Twitch ne pèse pas le plus lourd sur le plan financier (environ 260 000 € par an), mais c’est une arme de mobilisation massive.
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Bump : la fabrique à contenus et profits
Fondée en 2020, Bump est la véritable machine industrielle de l’empire Hauchard. En 2021, elle affichait 14 millions d’euros de chiffre d’affaires. En 2023, elle dépasse les 30 millions d’euros, avec un modèle fondé sur la production de contenus pour une centaine de créateurs (Gotaga, McFly & Carlito, etc.), et environ 5 000 vidéos produites par mois.
Bump produit, optimise, négocie, centralise. En 2021, 500 000 € de dividendes sont distribués. L’entreprise fonctionne comme une agence de talents, une maison de production et une régie publicitaire à la fois. Une architecture invisible, mais décisive.
GP Explorer : l’événementiel version start-up nation
C’est un cas d’école. Le GP Explorer 2023, sur le circuit du Mans, vend 60 000 billets en moins de 30 minutes, soit 3,2 millions d’euros de recettes. L’événement, diffusé sur Twitch et à la télévision, cumule audience de masse, sponsoring (Samsung, Cupra…), merchandising.
Squeezie crée une hybridation rare : une forme de convergence entre spectacle sportif, production audiovisuelle et plateforme numérique. Il privatise l’attention comme d’autres privatisent les infrastructures. L’événementiel devient un centre de profit autonome — mais aussi un outil de consolidation de la communauté.
Diversification : de la musique au kombucha
L’empire Squeezie s’étend bien au-delà de l’écran. Il sort un album en 2020, disque d’or, 20 000 ventes dès la première semaine. Il publie une bande dessinée, Bleak, avec 84 000 exemplaires vendus, soit 1,2 million d’euros de chiffre brut. Il lance en 2025 une boisson : Ciao Kombucha, première incursion dans l’agroalimentaire.
Tout ne réussit pas : sa marque de vêtements YOKO, lancée en 2019, est abandonnée en 2024 après des centaines de milliers d’euros de pertes. Mais l’échec est digéré, analysé, recyclé — pour mieux rebondir sur le merchandising de Gentle Mates, sa structure e-sport.
Les placements de produits : la vache à lait cachée
Souvent invisibles aux yeux du public, les placements de produits rapportent gros. Très gros. Entre 25 et 35 % du chiffre d’affaires total de Squeezie provient de ces collaborations. Les marques payent 20 à 30 € pour 1 000 vues sur des vidéos sponsorisées — soit jusqu’à 10 fois plus que la pub classique. Certaines campagnes dépassent 70 000 €.
La gestion se fait en direct via Bump, avec un accent mis sur la cohérence éditoriale : tech, gaming, lifestyle. Pas de pub hors sol, mais de la stratégie fine. Influence et crédibilité ne sont pas antagonistes — elles sont complémentaires.
Une montée en gamme
La vidéo « Stop the Train », avec ses 700 000 € de budget, n’est pas un coup de folie. C’est une étape logique : l’intégration de logiques de production proches du cinéma ou de la télévision. C’est aussi une réponse à un environnement numérique saturé, où seuls les contenus premium se démarquent.
Là où les débuts de Squeezie tenaient de l’artisanat (webcam, micro, montage maison), ses productions actuelles mobilisent équipes, logistique, tournages complexes, et financements conséquents. Le contenu devient produit culturel à part entière — et donc vecteur de rentabilité différée.
Un patrimoine structuré comme une entreprise
La fortune de Squeezie est diversifiée et optimisée.
- Immobilier : 3 appartements dans le VIIIe arrondissement à Paris, pour une valeur entre 2 et 3 millions d’euros
- Sociétés : Balai Steak, Bump, GP Explorer — toutes en SAS ou SARL, permettant une optimisation fiscale et sociale
- Liquidités et placements : 15 à 20 millions d’euros
- Participations : 5 à 8 millions
- Actifs divers : entre 3 et 5 millions
Soit des revenus bruts annuels entre 3,4 et 5,5 millions d’euros.