Le gouvernement Bayrou a fait un choix clair : réduire le pouvoir d’achat des retraités pour boucler son budget. Selon Les Échos, un article du prochain projet de loi de financement de la Sécurité sociale prévoit une sous-indexation des pensions de retraite jusqu’en 2030. C’est une mesure lourde de conséquences, pensée, décidée, assumée. À quelques jours d’un vote de confiance décisif, cette révélation montre le vrai visage d’un pouvoir qui demande aux plus âgés de payer l’addition.
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Le projet gouvernemental vise explicitement les pensions. Il ne s’agit pas d’un ajustement conjoncturel mais d’un véritable programme de sous-indexation étalé sur cinq ans. 2026 sera une « année blanche », sans revalorisation, un gel pur et simple. Puis, entre 2027 et 2030, la hausse des pensions sera plafonnée à 0,4 % par an, alors même que l’inflation est attendue au double. Autrement dit, une perte sèche de pouvoir d’achat organisée, planifiée, assumée.
Une guerre d’usure sociale
Ce choix s’inscrit dans un plan d’économies massif – 44 milliards d’euros en tout – dont les retraités supporteront 7,1 milliards. Soit 16 % de l’effort global. Une part démesurée. Car au-delà de la sous-indexation, c’est tout un arsenal qui se déploie contre cette population : réforme de l’abattement fiscal de 10 %, doublement des franchises médicales. Une guerre d’usure sociale, menée sans débat démocratique, contre des citoyens qu’on voudrait invisibles parce que vieillissants.
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Et pourtant, ils sont nombreux. Et pour beaucoup, fragiles. Ce n’est pas un choix neutre. C’est un choix de classe. Un choix idéologique. Un choix qui dit clairement qui doit payer l’ajustement budgétaire : ceux qui n’ont plus de levier pour se défendre, qui ne peuvent ni faire grève, ni descendre dans la rue, ni négocier leurs conditions de vie.
« Suicide politique »
Ce projet n’est pas seulement brutal. Il est aussi périlleux. En 2024, Michel Barnier avait tenté une manœuvre similaire. La sous-indexation partielle des pensions avait provoqué une levée de boucliers politique et social. Le gouvernement était tombé. Résultat ? Une revalorisation intégrale des pensions, indexée sur l’inflation, à 2,2 %. Coût pour les finances publiques : 6,5 milliards. L’histoire est là, comme un avertissement. Le pouvoir peut-il vraiment croire qu’il passera entre les gouttes cette fois ?
Le 8 septembre, François Bayrou pourrait devenir le premier Premier ministre de la Ve République à être renversé par un vote de confiance qu’il a lui-même sollicité. Marine Le Pen parle de “suicide politique”. Olivier Faure, du PS, évoque une décision “irrévocable”. L’Assemblée est en ébullition. Et si le gouvernement tombe, ce sont les règles automatiques qui reprendront la main : les pensions seront revalorisées selon l’inflation. Exit les économies. Retour au réel.
Le double jeu de Bayrou
Il faut relire les comptes rendus du conclave sur les retraites, ce long cycle de négociations avortées au printemps 2025. Pendant quatre mois, les partenaires sociaux ont tenté de s’accorder. En vain. Le Medef, accusé d’avoir torpillé les discussions, a refusé tout compromis sur la pénibilité ou les départs anticipés. Et sur la table, déjà, figurait une proposition de sous-indexation : 0,8 % en 2026, puis 0,4 % jusqu’en 2030. Rejetée. Inacceptable pour les syndicats.
Aujourd’hui, cette même proposition, désavouée par la négociation sociale, revient par la fenêtre gouvernementale. Comme si la démocratie sociale n’était qu’un théâtre d’ombres. Comme si le dialogue social n’était qu’un alibi. La violence symbolique est là, dans ce recyclage de mesures sans mandat, imposées d’en haut, dans le silence du huis clos budgétaire.