Charles Consigny bouscule la droite française

De ses débuts conservateurs à sa tribune quotidienne sur BFM TV, Charles Consigny incarne une droite tiraillée, critique, mais toujours influente. Portrait d’un électron libre.

Résumé Résumé

Il est avocat, chroniqueur, ancien candidat et désormais voix quotidienne sur BFM TV. Il a soutenu Christine Boutin avant de s’en distancier, défendu Sarkozy, salué Barnier, voté Pécresse et moqué tout le monde. Il parle fort, tranche vite, puis nuance. Charles Consigny, 36 ans, n’est ni tout à fait dans le rang, ni franchement hors-jeu. À la manière d’un sismographe, il enregistre les secousses internes de la droite française contemporaine, en même temps qu’il les provoque.

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Il se revendique « old school, mais pas réactionnaire ». Le ton est donné. Né en 1989 à Paris, dans une famille où culture et service public sont des valeurs patrimoniales, Consigny grandit au cœur d’un monde codé, structuré — et pourtant vite bousculé. La mort de sa sœur, le divorce de ses parents, un passage par les drogues : tout cela constitue un socle paradoxal, instable mais formateur. Il s’en extrait par le droit, par l’écriture, et surtout par la parole.

Car ce qui définit d’abord Charles Consigny, c’est une capacité à prendre le micro — pour dire, pour contredire, pour exister. Il s’impose comme chroniqueur, avocat, essayiste, au carrefour de l’intellect et du spectacle. Sa droite à lui est mouvante, mais articulée : libérale économiquement, autoritaire sur le régalien, conservatrice sur les valeurs, mais toujours teintée d’un individualisme critique qui le garde à distance des partis.

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Engagements en zigzag

En 2010, alors qu’il n’a que 21 ans, il se rapproche de Christine Boutin, matrone d’un christianisme social aujourd’hui marginalisé. Il s’oppose au mariage pour tous, ce qui détonne : son homosexualité assumée rend ce positionnement doublement surprenant. Provocation ? Sans doute. Trois ans plus tard, il retourne sa veste — et publie une tribune favorable à la loi dans Le Point. Entre-temps, il explique qu’il avait voulu « rigoler », créer une « infox ». Ce qui aurait pu rester un épisode isolé devient un fil rouge : chez Consigny, la stratégie précède souvent la conviction, sans pour autant l’effacer.

Il admire Sarkozy pour sa verticalité, Pécresse pour sa technicité, Barnier pour son sérieux européen. Il attaque la droite quand elle s’endort, et la gauche quand elle s’enferme. À chaque fois, c’est l’effort de pensée qui semble primer sur l’appartenance partisane. Il critique la technocratie, défend la méritocratie, mais se garde bien d’abandonner les symboles républicains à l’extrême droite. Il cherche une droite efficace, mais pas populiste ; ferme, mais pas caricaturale.

Un passage par les urnes, révélateur de la disjonction entre notoriété et légitimité

En 2022, Charles Consigny tente l’épreuve du feu électoral. Candidat LR dans la 4e circonscription des Yvelines, il y mène une campagne classique : baisse des impôts, autorité de l’État, réforme administrative. Terrain favorable, nom connu, relais médiatiques assurés. Résultat : 12,77 % des voix au premier tour. Élimination sèche. Il parlera lui-même d’« échec sans appel ». Une preuve que la visibilité médiatique ne se convertit pas automatiquement en capital politique.

Depuis, il a réinvesti le champ de la parole libre. Tribune après tribune, chronique après chronique, il dessine les contours d’une droite qui ne s’excuse pas d’être à droite, mais qui ne veut pas renoncer à penser. Il critique les retards technologiques, le conformisme économique, la paresse stratégique. Il s’attaque aux pesanteurs internes, aux tabous, aux demi-mesures. Il cogne, mais il construit aussi. Dans un paysage où la parole politique est souvent aseptisée, son style tranche.

Une parole forte, mais parfois à la limite

Reste que cette liberté de ton peut dériver. En septembre 2024, une blague sur le viol prononcée à l’antenne de RMC choque. Puis, quelques mois plus tard, il parle des « Khmers verts » en plein débat avec Marine Tondelier. Tollé, excuses publiques. L’affaire est classique : la frontière entre franchise et outrance est floue, surtout quand le personnage public se confond avec le rôle médiatique.

Sur les questions migratoires, il durcit nettement son discours : refus de la mixité imposée, critiques des politiques jugées laxistes, renvoi systématique des délinquants étrangers. Une inflexion sensible depuis la seconde moitié des années 2010, amplifiée dans ses interventions aux Grandes Gueules. À gauche, on dénonce ; à droite, on s’interroge. Mais lui assume, sans se rapprocher pour autant des extrêmes. Il maintient une fidélité aux institutions et aux principes républicains qui balise son positionnement.

Signé Consigny : un regard personnel

En 2025, Charles Consigny passe à un autre registre. Il hérite d’un fauteuil symbolique : celui d’Alain Duhamel sur BFM TV. Tous les soirs à 18h30, Signé Consigny : un regard personnel et assumé. Moins de punchlines, plus d’analyses. C’est la bascule : d’agitateur à commentateur, de polémiste à éditorialiste.

Il ne dirige pas, ne mobilise pas, mais il observe, il articule, il éclaire. Il incarne une droite à la fois classique dans ses valeurs et moderne dans sa forme, critique sans être cynique, engagée sans être encartée. Un électron libre ? Plutôt une particule chargée, témoin de tensions plus larges. Celles qui tiraillent une droite française encore incertaine de son cap : entre conservatisme et libéralisme, entre autorité et ouverture, entre rupture et responsabilité.



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