L’administration américaine, sous l’égide de Donald Trump, persiste et signe. Contrôler qui entre, qui reste, mais surtout ce que ces individus pensent. Car désormais, ce sont aussi les idées qui franchissent ou non les frontières.
À partir du 19 août, les services d’immigration devront non seulement examiner les pièces justificatives, mais également scruter les prises de parole, les affiliations, les « sympathies » politiques. Un message limpide : on ne devient pas résident – encore moins citoyen – sans alignement idéologique. Exit la neutralité. L’ombre portée du maccarthysme ressurgit, adaptée à l’ère numérique.
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Tous surveillés, en permanence
Deux jours après, le Département d’État enfonce le clou : plus de 55 millions de détenteurs de visas verront leur activité en ligne surveillée de manière continue. Surveiller, trier, expulser. Le terrain ? Toujours le même : soupçons de terrorisme, de fraude migratoire ou de simples écarts de langage sur les réseaux sociaux. Big Brother, mais version douanière.
Les références à la guerre froide ne sont pas fortuites. À l’époque, les communistes étaient persona non grata. Aujourd’hui, c’est tout discours jugé « hostile à l’Amérique » qui peut suffire à déclencher une alerte. Mais qui définit cette hostilité ? La frontière entre opinion critique et menace est laissée à l’appréciation des agents. Autrement dit, à la subjectivité administrative.
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Le 21 août, la Sécurité intérieure tranche : les critiques des États-Unis peuvent désormais justifier un refus d’entrée. L’argument est implacable dans sa brutalité : « On ne cherche pas à habiter un pays qu’on déteste. » L’immigration se voit transformée en acte d’allégeance. L’adhésion ne suffit plus : il faut prouver son enthousiasme.
L’idéologie comme filtre migratoire
Ce filtrage n’a rien de théorique. Il s’applique. Étudiants interdits de territoire pour avoir soutenu la Palestine. Pseudonymes exigés, publications passées épluchées, et bientôt un contrôle de la « bonne moralité ». Ce concept englobera tout, du civisme fiscal au niveau d’étude, en passant par la stabilité professionnelle. L’immigré modèle, version 2025 : docile, discret, et reconnaissant.
Au fond, cette politique dit une chose : l’Amérique doute. D’elle-même et de ses institutions. Alors elle durcit, elle exclut, elle sélectionne. Dans un monde où l’information circule sans passeport, elle tente de contenir les idées par les frontières. Mais une démocratie qui craint la contestation affaiblit ce qu’elle prétend défendre.