Les pharmaciens au bord de la crise de nerfs

Remises en baisse, marges réduites, fermetures redoutées : les pharmaciens lancent l’alerte face à une réforme explosive du gouvernement.

C’est une ligne sèche au Journal officiel, publiée en plein cœur de l’été, qui a allumé la mèche. L’arrêté du 6 août, abaissant les plafonds de remise sur les médicaments génériques, hybrides et biosimilaires, confirme ce que les représentants des pharmaciens redoutaient : le gouvernement a tranché, et il n’a pas choisi la conciliation. La rentrée s’annonce donc orageuse.

Dans un secteur déjà sous tension, la mesure passe mal. Très mal. À partir du 1er septembre, les remises sur les génériques seront plafonnées à 30 %, puis 25 % l’an prochain, pour s’aligner à 20 % en 2027 — un traitement identique pour toutes les molécules, génériques ou pas. Le geste est technique. Ses implications sont politiques.

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Les conséquences économiques pour les officines de proximité

Pour les syndicats, cette décision acte une rupture. Le mot « trahison » revient dans leurs communiqués, le ton est martial. L’intersyndicale appelle à une série d’actions dès la fin de l’été : fermetures de pharmacies, grèves des gardes, refus d’appliquer le tiers payant… Une journée noire est déjà annoncée pour le 18 septembre. Et le mot d’ordre est clair : durcir le rapport de force.

L’État, de son côté, cherche à rationaliser les dépenses, à contenir un système de santé sous pression budgétaire. Mais il le fait au risque de fragiliser encore un maillon essentiel du soin de proximité. Car derrière la question des remises se cache une réalité économique brutale : la rentabilité des officines. Moins de marges, c’est moins de trésorerie. Moins de trésorerie, c’est moins de services — ou des fermetures. L’équation est connue.

Les syndicats comptent mobiliser les patients, mais aussi interpeller les parlementaires. Ils veulent raconter ce qui se profile : des officines qui tirent le rideau, des zones rurales sans pharmacie, des distances qui s’allongent pour trouver un médicament. Ce sont des risques bien réels — et connus. Mais le gouvernement semble parier que les pharmaciens finiront par plier.

L’offensive juridique des pharmaciens contre le décret

L’Union des syndicats de pharmaciens d’officine (USPO) ne l’entend pas ainsi. Elle lance une double offensive judiciaire : une QPC devant le Conseil constitutionnel, un recours devant le tribunal administratif. Objectif : démontrer le caractère inconstitutionnel de l’arrêté, son absence de base économique ou sanitaire, et surtout son incompatibilité avec l’accès aux soins.

La bataille s’engage donc sur deux fronts, politique et juridique. Et comme souvent dans les dossiers de santé, elle mêle finances publiques, accès aux soins et arbitrages implicites. L’État cherche des économies. Les pharmaciens veulent défendre leur modèle. Entre les deux, un patient trop souvent oublié, et qui risque de payer l’addition.



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