Pessac : Tehtris va supprimer 49 postes malgré des levées record

Encore une pépite de la tech française qui trébuche sur ses ambitions. Tehtris, le spécialiste de la cybersécurité basé à Pessac, s’apprête à licencier près de 30 % de ses effectifs, selon Les Echos. Un plan de sauvegarde de l’emploi (PSE) est en cours de préparation : 49 postes supprimés sur les quelque 165 restants. L’entreprise en comptait 270 il y a encore deux ans.

Une coupe sévère, qui sonne comme un aveu d’échec dans un secteur pourtant porté par une croissance structurelle. Mais à y regarder de plus près, la trajectoire de Tehtris illustre une fois de plus les limites d’un capitalisme de l’innovation qui exige toujours plus, toujours plus vite.

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Déjà 64 millions levés auprès d’investisseurs

Créée en 2010 par deux anciens de la DGSE, Elena Poincet et Laurent Oudot, la société avait tout pour plaire : une technologie maison, une ambition affichée d’indépendance vis-à-vis des solutions américaines, et un positionnement aligné avec les priorités souverainistes de l’État. En 2020, elle lève 20 millions d’euros. Deux ans plus tard, rebelote avec un tour de table à 44 millions, mené par Jolt Capital, avec la bénédiction de Tikehau, CNP Assurances et du fonds régional Naco. 64 millions injectés pour faire émerger un champion européen de la cybersécurité.

Après avoir ciblé les grands comptes du CAC 40, Tehtris décide de se tourner vers les PME, puis de s’internationaliser à marche forcée. En mai dernier, ses dirigeants suivaient Emmanuel Macron en Asie du Sud-Est pour ouvrir de nouveaux marchés. Dans le même temps, la maison brûlait : départs en série dans les équipes techniques, instabilité à la tête du service commercial, prise de recul du cofondateur historique Laurent Oudot, et une R&D confiée à un vétéran du logiciel, certes expérimenté, mais étranger au monde cyber.

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Le résultat ? Un modèle économique sous tension, un chiffre d’affaires toujours gardé secret, et désormais une restructuration imposée. Selon une source interne, la mise en place du PSE serait même la condition posée par les investisseurs pour recapitaliser l’entreprise. Autrement dit : les fonds exigent des sacrifices avant de remettre la main à la poche.

Le cas Tehtris rappelle que la tech française reste fragile, même dopée aux millions. Derrière les discours sur la souveraineté numérique, les logiques de rendement restent implacables. Et dans la course à la scale-up, peu importe si l’on y laisse une partie des équipes en route. Le caillou est parfois dans la chaussure bien avant qu’on ne le voie.



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