C’est l’histoire d’un miracle devenu cauchemar. En 1950, le monde produisait 2 millions de tonnes de plastique. En 2022, il en a craché 475 millions. Et si rien ne change, ce sera plus d’un milliard de tonnes en 2060. Ce n’est plus une croissance, c’est une prolifération. Le plastique a tout envahi : la santé, la voiture, l’alimentation, les avions, les salons et même nos organismes.
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Car la matière miracle a aussi un revers toxique. Elle pollue l’air, l’eau, les sols. Elle s’accumule dans les entrailles des océans et dans nos cellules. Moins d’un quart des molécules plastiques ont été évaluées scientifiquement, et parmi celles-ci, les deux tiers posent problème. La production représente déjà 4 % des émissions mondiales de CO₂. Et pourtant, elle continue d’augmenter.
Un traité international en négociation à Genève
C’est ce constat qui a poussé les Nations unies à lancer, en 2022, un cycle de négociations en vue d’un traité international sur la pollution plastique. La dernière ligne droite s’ouvre ce lundi à Genève. Mais à ce stade, le texte n’est qu’un amas de crochets, autrement dit de formulations encore non validées. La précédente réunion, à Busan, a tourné court. Celle-ci est censée la rattraper.
Le cœur du blocage est connu : faut-il réduire la production de plastique ? Pour les pays producteurs — pétromonarchies du Golfe, Russie, Iran, mais aussi une partie des BRICS —, la réponse est non. Ils préfèrent parler de gestion des déchets et de recyclage. En clair, gérer l’aval sans toucher à l’amont. Une stratégie qui revient à écoper sans fermer le robinet.
Face à eux, une coalition de 96 pays menée par l’Union européenne plaide pour une baisse effective de la production. « Tout sauf la réduction, c’est inacceptable », insiste Henri Costa-Bourgeois, de la Fondation Tara. La ministre française de la Transition écologique, Agnès Pannier-Runacher, fera d’ailleurs le déplacement à Genève pour tenter de peser dans la balance.
Mais les règles du jeu pourraient évoluer. Certains proposent d’abandonner le consensus au profit d’un vote majoritaire — une possibilité prévue par les statuts onusiens. L’idée : forcer les producteurs par les consommateurs. Le vieux réflexe européen, qui a longtemps cru imposer ses normes au monde, revient. Mais l’Europe n’est plus seule. Son poids décline, ses illusions avec.
La position ambiguë de la Chine sur le plastique
Reste une inconnue de taille : la Chine. Le pays est l’un des plus gros transformateurs de plastique, sans en être un producteur majeur. Officiellement, il refuse toute baisse de la production. Officieusement, ses chercheurs publient massivement sur les risques sanitaires du plastique, parfois plus que leurs homologues occidentaux. Une inflexion en cours ? Réponse à Genève.