Safran, une victoire industrielle inattendue pour la France

C’est un symbole fort : Safran relocalise en France avec une usine high-tech, 200 emplois qualifiés à la clé et un pari sur l’avenir bas carbone.

Une fois n’est pas coutume : la France gagne. Et ce n’est pas un simple trophée de plus sur l’étagère des communicants de Bercy, c’est un morceau de vraie réindustrialisation qui vient de s’ancrer dans la plaine de l’Ain. Safran, l’un des rares groupes industriels tricolores à jouer dans la cour des grands mondiaux, a tranché : sa nouvelle usine de freins carbone sera bien française.

Cela faisait cinq ans que l’affaire traînait. Cinq années pendant lesquelles les vents contraires n’ont pas manqué. D’abord le Covid, puis la flambée des prix de l’énergie en Europe – merci Poutine – avaient presque enterré l’option hexagonale. Les sites nord-américains, plus compétitifs, semblaient tenir la corde. Le Québec et l’Oregon, adossés à une électricité hydraulique à prix d’ami, faisaient figure de favoris. Une énième illustration, croyait-on, de l’attrait des grands groupes pour des terres plus dociles, plus compétitives, plus simples.

Un pari sur la réindustrialisation

Mais non. À la dernière minute, retournement. Grâce à un faisceau de petits miracles industriels : une EDF ragaillardie par sa renationalisation, un patron plus souple, un tarif compétitif (55 €/MWh selon certaines indiscrétions), et une mobilisation tous azimuts des élus, syndicats et collectivités, la France a réussi à refaire son retard. Mieux : elle a regagné sa place.

Le symbole est fort. Ce sera la quatrième usine de freins carbone de Safran, après Villeurbanne, Walton (Kentucky) et Sendayan (Malaisie). Un investissement de 450 millions d’euros, le plus massif depuis des décennies pour le groupe. À la clé : 200 emplois hautement qualifiés, une capacité de production en hausse de 25 % d’ici 2037, et un nouveau pied industriel solidement ancré dans l’économie bas carbone.

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Mais ce symbole vaut autant pour ce qu’il dit de la méthode que du résultat. Ce n’est pas la technocratie parisienne qui a sauvé le dossier, mais la convergence d’intérêts entre un industriel exigeant, une électricienne enfin à l’écoute, et un territoire – l’Ain – prêt à s’engager. Avec un coup de pouce politique non négligeable : Laurent Wauquiez, président de région et soutien actif du projet, n’est pas étranger à l’attractivité du site.

Même les gaffes ont servi. Quand Olivier Andriès, le patron de Safran, a évoqué devant l’Assemblée nationale son refus d’investir « dans une ville dirigée par une majorité écologiste », ce fut le déclic. Les propositions ont afflué, comme si le monde politique découvrait soudain qu’il fallait séduire les industriels autrement qu’avec des discours.



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