Aéronautique : la conquête américaine d’Aura Aero

Le constructeur toulousain Aura Aero signe sa première vente outre-Atlantique. Une étape clé pour sa stratégie de conquête du marché US.

C’est une petite commande, mais un signal fort. Le constructeur aéronautique toulousain Aura Aero vient de vendre un de ses avions de voltige Integral R à une figure bien connue du monde aérien outre-Atlantique : Michael Goulian, pilote émérite et formateur aguerri. Une vente anodine en apparence – un seul appareil, destiné à une école de pilotage dans le Massachusetts – mais qui illustre une dynamique plus large : la pénétration d’un acteur français sur un marché nord-américain aussi tentant qu’exigeant.

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Le marché américain, avec ses 600 écoles de pilotage certifiées FAA et ses dizaines de milliers de pilotes actifs, est non seulement le plus vaste au monde, mais aussi l’un des plus friands d’appareils modernes, performants, et surtout… adaptés aux nouvelles contraintes économiques, écologiques et pédagogiques.

Dans la cour des grands

Aura Aero, fondée en 2018, avance vite. L’entreprise, encore jeune, veut jouer dans la cour des grands. Elle prévoit de livrer 10 à 12 Integral R d’ici la fin de l’année, tout en poursuivant le développement de ses deux autres déclinaisons : l’Integral S, davantage orienté formation de base, et l’Integral E, une version 100 % électrique annoncée pour 2027. Une ambition électrique qui n’est plus un luxe de communication, mais une condition d’entrée dans un secteur où la décarbonation n’est plus un choix stratégique, mais un prérequis réglementaire.

Mais c’est surtout avec l’ERA, son projet d’avion régional hybride de 19 places, qu’Aura Aero affiche un changement d’échelle. Avec plus de 10 milliards d’euros de précommandes annoncés au dernier Salon du Bourget, le constructeur passe du statut de start-up industrielle à celui de prétendant crédible dans le transport aérien régional, un créneau où la transition énergétique va rebattre les cartes plus vite qu’on ne l’imagine.

Une base financière encore fragile

Les chiffres donnent le vertige : 650 ERA commandés, 200 millions d’euros de soutien public venus de Floride, une usine de 50 000 m² à construire, 1 000 emplois à créer. En parallèle, un premier pied-à-terre industriel a déjà vu le jour dans les locaux de l’Université Embry-Riddle, avec le soutien de l’agence spatiale locale Space Florida. Le tout dans un contexte de politique commerciale américaine de plus en plus ferme, où l’implantation locale devient la condition d’accès au marché. L’avionneur toulousain l’a bien compris : l’industrie se joue désormais aussi sur le terrain géopolitique.

Reste la question du tempo. En France, la société a également déposé un permis de construire pour une nouvelle usine à Toulouse-Francazal, avec une mise en service prévue pour 2028. Et elle emploie déjà 220 personnes, sans compter 80 partenaires externes. Mais ce développement tous azimuts repose encore sur une base financière fragile. Un nouveau tour de table est en préparation, censé apporter « plusieurs dizaines de millions d’euros ». Aura Aero joue donc sur deux tableaux : l’innovation produit et la crédibilité industrielle, avec en toile de fond une exigence impérieuse de consolidation capitalistique.



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