C’est une réforme aux fausses allures de justice fiscale. Mais elle devrait se traduire par un alourdissement net pour une partie des retraités. François Bayrou propose de remplacer l’abattement fiscal de 10 % accordé aux pensions par un forfait fixe de 2000 euros. Objectif affiché : avantager les petites retraites, préserver le pouvoir d’achat des moyennes et remettre les plus élevées dans le droit commun. Mais derrière l’intention, les chiffres racontent une tout autre histoire.
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Les retraités, grands perdants du plan Bayrou
Première lame : la non-indexation des pensions en janvier 2026. Deuxième lame : la fin d’un abattement proportionnel qui, jusqu’ici, était plafonné à 4399 euros par foyer, avec un minimum de 450 euros par bénéficiaire. Il s’appliquait automatiquement, quelle que soit la configuration du foyer, et avantageait mécaniquement les revenus les plus élevés. Mais aussi les retraités seuls, veufs ou célibataires.
Le nouveau système change la logique : le forfait serait attribué par part fiscale. Un retraité seul aurait droit à 2000 euros, un couple à 4000 euros. Ce changement modifie profondément les équilibres.
Peu de gagnants…
En théorie, ceux qui déclarent moins de 20 000 euros devraient y gagner. En pratique, c’est marginal. En dessous de 18 970 euros, on n’est pas imposable. Entre ce seuil et 20 000 euros, on trouve les rares profils qui tireront un très léger bénéfice du forfait. Exemple type : un retraité seul de moins de 65 ans avec 19 920 euros de revenus annuels gagnera… 4 euros par an.
Au-delà de ce seuil, le forfait devient défavorable. La mécanique de l’abattement proportionnel reprenait le dessus.
Retraités seuls : les grands perdants de la réforme
Le coup est rude pour les retraités seuls. Exemple : un veuf avec 30 000 euros de revenus bénéficiait d’un abattement de 3000 euros et payait 1365 euros d’impôts. Avec le forfait, l’abattement tombe à 2000 euros, et l’impôt grimpe à 1525 euros, soit 160 euros de plus.
Plus les revenus montent, plus la note s’alourdit. Pour un veuf à 40 000 euros de pension, le passage au forfait entraîne une hausse de 600 euros (+15,1 %), quand un couple à 80 000 euros ne voit son impôt augmenter que de 120 euros (+1,5 %).
L’AFP chiffre à plus de 1080 euros par an la hausse pour les retraités seuls les plus aisés.
Couples retraités : presque intacts, même à hauts revenus
Le paradoxe est là : la réforme Bayrou vise les plus hauts revenus mais épargne largement les couples, y compris très confortables. Le plafond de l’abattement actuel est de 4399 euros par foyer. Le nouveau forfait monte à 4000 euros pour un couple. La différence est faible. Pour un couple dans la tranche à 45 %, le surcoût maximal serait de 180 euros.
Derrière les grands principes d’équité fiscale, une réalité plus brute : cette réforme touche peu les très riches, davantage les retraités seuls, et surtout, elle accroît le nombre d’imposables.