Le futur a parfois des allures de cul-de-sac. Elon Musk, l’homme qui voulait sauver la planète avec des voitures électriques et conquérir Mars avec des fusées privées, semble aujourd’hui avoir raté un virage plus terrestre : celui de la rentabilité industrielle. Son navire amiral, Tesla, tangue. Les ventes chutent, les profits fondent, et la Bourse déchante. Autrement dit, le rêve s’essouffle.
Au deuxième trimestre, les livraisons de véhicules ont plongé de 13,5 %, confirmant une dynamique bien installée : c’est le deuxième trimestre consécutif de recul à deux chiffres. Le chiffre d’affaires suit la même pente (–12 %), et le résultat opérationnel s’écroule de 42 %, à moins d’un milliard de dollars. Pour un champion de la disruption, ça fait désordre.
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L’ambition technologique de Musk se heurte à la réalité
Comme souvent chez Elon Musk, l’optimisme tient lieu de stratégie. Il parle d’une « période de transition bizarre » — étrange manière de dire que les aides publiques s’évaporent pendant que la technologie promise n’est toujours pas au rendez-vous. Le crédit d’impôt de 7.500 dollars a été sabré, les quotas environnementaux repensés, et l’appui politique du moment — Donald Trump — ne se traduit pas exactement par une pluie de subventions.
Cela ne l’empêche pas d’annoncer, encore, la révolution prochaine. Les voitures autonomes ? En test à Austin. Les robots humanoïdes ? Pour demain. Le logiciel de conduite Full Self-Driving ? Bientôt incontournable. Mais la réalité est moins flamboyante : ces « cybercabs » texans grillent les feux rouges et oublient parfois qu’un piéton, ça ne se programme pas.
La fin des aides publiques fragilise le modèle Tesla
L’implication croissante d’Elon Musk dans les jeux d’influence de Washington n’aide pas. Après avoir flirté avec le trumpisme, l’entrepreneur s’est éloigné quelques semaines de ses entreprises pour plancher sur le budget fédéral, sur injonction présidentielle. Résultat : une guerre d’ego avec l’ex-locataire de la Maison-Blanche, un retrait partiel des aides aux véhicules électriques… et une image brouillée. Certains clients s’en détournent. Les investisseurs, eux, n’attendent pas. L’action Tesla a perdu plus de 30 % depuis ses sommets de décembre.
Face à cette tempête, Musk fait ce qu’il sait faire : promettre. L’objectif est clair : rendre Tesla irrésistible non pas par ses voitures, mais par ses logiciels. Transformer la firme automobile en boîte technologique. Louable ambition… mais risquée, tant que la promesse d’autonomie reste suspendue aux aléas réglementaires et techniques.
Pendant ce temps, la concurrence asiatique monte en gamme, les prix baissent, et Tesla n’a toujours pas renouvelé en profondeur son catalogue. Le lancement, en catimini, d’un Model Y « allégé » pour en faire une voiture « abordable » ressemble davantage à une rustine qu’à une véritable relance industrielle. Et la montée en puissance, dixit le directeur financier, « prendra plus de temps que prévu ».