Les retraités, nouvelle cible de Bayrou

Pensions non revalorisées, abattement plafonné : ce qui change pour les retraités l’an prochain.

Le gouvernement de François Bayrou a choisi de cibler les retraités dans l’effort de redressement des finances publiques. Gel des pensions, refonte des abattements fiscaux : des mesures qui suscitent déjà des critiques de toutes part. À quelques mois du débat budgétaire, l’exécutif prend le risque de s’aliéner un électorat stratégique.

La question d’une participation accrue des retraités à l’équilibre des comptes publics n’est pas nouvelle. Elle avait déjà précipité, en 2024, la chute du gouvernement Barnier après l’annonce d’un gel partiel des pensions. Loin de se refermer, le dossier revient aujourd’hui au centre du débat, porté cette fois par François Bayrou. Confronté à une contrainte budgétaire sévère et à l’exigence de contenir la dépense publique, le gouvernement assume une inflexion plus franche dans la distribution des efforts.

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Gel des pensions et réforme fiscale : le double front

Deux leviers sont activés. D’abord, la non-revalorisation des pensions en 2026, malgré l’inflation. Ensuite, la transformation d’un dispositif fiscal avantageux pour les retraités : l’abattement de 10 %, qui permettait de réduire l’assiette de l’impôt sur le revenu, serait remplacé par un abattement forfaitaire de 2.000 euros par personne.

Ce changement n’est pas neutre. Il modifie la logique même de l’avantage fiscal, jusque-là proportionnel au revenu. Plus un retraité avait de revenus, plus l’abattement était conséquent. Le gouvernement entend désormais plafonner cet avantage, le rendre égalitaire dans sa forme, et le recentrer sur les foyers aux revenus modestes ou intermédiaires.

Cibler les retraités

Lors de son audition devant les députés, la ministre du Budget Amélie de Montchalin a défendu une mesure de justice fiscale. Selon elle, le dispositif actuel est déséquilibré : « Plus vous êtes un retraité aisé, plus vous bénéficiez de l’abattement. » Elle s’est appuyée sur un constat ancien du Conseil des prélèvements obligatoires, qui relevait déjà l’inefficacité redistributive du mécanisme.

D’après les projections de Bercy, la réforme pourrait générer un gain budgétaire de l’ordre d’un milliard d’euros. Ce chiffre reste proche des préconisations formulées par la Cour des comptes, qui appelait à recentrer l’avantage sur les classes moyennes inférieures. Le gouvernement insiste sur la progressivité du nouveau système : un retraité aux revenus modestes continuerait à bénéficier d’un abattement significatif, tandis que les plus aisés seraient mis davantage à contribution.

Malgré les précautions oratoires de la ministre, les critiques émergent de toutes parts. La CFDT, tout en reconnaissant la nécessité de revoir certains dispositifs fiscaux, a appelé à « aller au-delà de 2.000 euros » pour préserver les petites retraites. Le flou persistant sur le nombre exact de « gagnants » et de « perdants » nourrit la méfiance. À l’Assemblée, plusieurs parlementaires ont demandé que l’exécutif publie des simulations précises. La ministre s’y est dite favorable, mais n’a pas fourni d’échéancier.

À droite, Bruno Retailleau, chef de file des Républicains, a dénoncé le cumul de mauvaises nouvelles pour les retraités : une « année blanche » sans revalorisation, et une suppression d’abattement perçue comme une hausse d’impôt déguisée. À gauche, François Hollande a réagi en appelant à protéger les « petites retraites » et à ne pas opposer solidarité et justice sociale.



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