La politique commerciale de Donald Trump devait renforcer l’économie américaine. Elle pourrait bien finir par l’asphyxier. La montée des prix révèle les premières fissures du modèle protectionniste mis en place depuis 2018.
Longtemps présentée comme un levier de réindustrialisation et de souveraineté, la guerre commerciale voulue par Donald Trump commence à montrer ses effets concrets sur l’économie intérieure. Alors que l’administration multiplie les mesures protectionnistes, les ménages américains voient les prix grimper, mois après mois, dans un contexte international tendu.
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Selon les données publiées par le Bureau of Labor Statistics (BLS), l’inflation a atteint 2,7 % sur un an au mois de juin. Il s’agit du troisième mois consécutif de hausse, après 2,4 % en mai et 2,3 % en avril. Sur un mois, les prix ont progressé de 0,3 %, contre 0,1 % le mois précédent. Hors alimentation et énergie, l’inflation dite sous-jacente atteint désormais 2,9 % sur un an, confirmant une tendance de fond qui alimente les tensions entre sphères politique, économique et monétaire.
Les droits de douane dans le viseur des économistes
Pour de nombreux économistes, cette dynamique inflationniste trouve en partie son origine dans la politique commerciale menée par la Maison-Blanche. Depuis l’entrée en vigueur de plusieurs séries de droits de douane sur les importations, les produits étrangers sont devenus plus coûteux.
Ces mesures tarifaires, instaurées à partir d’avril, n’ont pas provoqué de flambée immédiate des prix grâce aux stocks constitués en amont par certaines entreprises. Ces réserves ont permis de lisser les effets à court terme. Mais la mécanique inflationniste semble enclenchée, et les protections temporaires pourraient bientôt atteindre leurs limites.
L’énergie, accélérateur conjoncturel
Parmi les autres facteurs expliquant la hausse des prix, l’énergie joue un rôle non négligeable. La flambée des cours du pétrole, consécutive aux tensions entre Israël et l’Iran, a entraîné une augmentation marquée des prix à la pompe. Dans son dernier rapport, le BLS note également une progression notable des prix de l’électricité et du gaz d’un mois sur l’autre.
Cette envolée des coûts énergétiques, bien que ponctuelle, vient s’ajouter aux effets plus durables des politiques commerciales, contribuant ainsi à renforcer les pressions inflationnistes sur l’ensemble de l’économie.
Une lecture divergente du côté de Trump
Face aux critiques, l’administration Trump avance d’autres interprétations. Kevin Hassett, conseiller économique du président, a évoqué sur la chaîne CNBC l’idée d’un « patriotisme économique » qui inciterait les consommateurs à privilégier les produits américains. Il affirme également que certains pays exportateurs auraient choisi de ne pas répercuter les droits de douane sur leurs prix, limitant ainsi leur effet inflationniste.
Ces arguments ne s’appuient toutefois pas sur des données consolidées, et n’ont pas été confirmés par des sources indépendantes. Ils peinent donc à convaincre une partie des observateurs, qui continuent de pointer la guerre commerciale comme un facteur central.
Les semaines à venir pourraient marquer un tournant. Si aucun accord n’est trouvé d’ici au 1er août avec les pays concernés, l’administration américaine prévoit d’appliquer des droits de douane supplémentaires, cette fois à leur maximum.
Le New York Times souligne le risque d’un « choc stagnant » : un scénario dans lequel l’inflation progresse tandis que la croissance marque le pas, voire se contracte. Ce type de configuration représente l’un des défis économiques les plus redoutés, aussi bien par les économistes que par les responsables politiques.
La Réserve fédérale sur la défensive
Dans ce contexte, les regards se tournent vers la Réserve fédérale. Depuis plusieurs mois, Donald Trump multiplie les appels à une baisse des taux directeurs, espérant ainsi soutenir l’activité économique. Mais jusqu’à présent, Jerome Powell, président de l’institution, a résisté à ces pressions.
La Fed maintient pour l’instant ses taux entre 4,25 % et 4,50 %, estimant que les conditions ne sont pas réunies pour un assouplissement. Comme le rappelle le New York Times, deux éléments pourraient justifier une telle décision : une inflation maîtrisée, ou un affaiblissement clair du marché du travail. Or, à ce stade, aucun de ces deux signaux ne s’est matérialisé.