Le coût moyen d’une carte grise atteint en 2025 un niveau inédit en France. Avec un cheval fiscal désormais fixé à 50,33 euros en moyenne – soit une augmentation de 11 % par rapport à 2024 –, la fiscalité sur l’immatriculation s’alourdit significativement pour les automobilistes.
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Des hausses tirées par les régions
La flambée des prix s’explique principalement par l’augmentation de la taxe régionale, qui constitue la part la plus importante du coût d’une carte grise. Cinq régions appliquent désormais le tarif plafond de 60 euros par cheval fiscal : Bourgogne-Franche-Comté, Bretagne, Centre-Val de Loire, Grand Est et Normandie. Dans certains cas, comme en Normandie, la hausse est particulièrement marquée, avec un passage de 46 à 60 euros depuis janvier 2025.
À l’inverse, les régions ultramarines demeurent les plus accessibles. Mayotte conserve la première place parmi les territoires les moins chers, avec un tarif inchangé de 30 euros. La Guadeloupe, la Guyane et la Corse maintiennent également des prix inférieurs à 45 euros.
Entre ces extrêmes, plusieurs régions affichent des hausses significatives sans atteindre le plafond. La Provence-Alpes-Côte d’Azur, par exemple, passe de 51,20 à 59 euros, tandis que la Nouvelle-Aquitaine grimpe de 45 à 53 euros.
Région | Prix 2025 (€ / CV) |
Évolution du prix | Date d’application |
---|---|---|---|
Bourgogne-Franche-Comté | 60 | 55 € → 60 € (+5 €) | Juillet 2025 |
Bretagne | 60 | 55 € → 60 € (+5 €) | Février 2025 |
Centre-Val de Loire | 60 | 55 € → 60 € (+5 €) | Janvier 2025 |
Grand Est | 60 | 48 € → 60 € (+12 €) | Février 2025 |
Normandie | 60 | 46 € → 60 € (+14 €) | Janvier 2025 |
Occitanie | 59,50 | 54,50 € → 59,50 € (+5 €) | Juillet 2025 |
Provence-Alpes-Côte d’Azur | 59 | 51,20 € → 59 € (+7,80 €) | 2025 |
La Réunion | 57 | 51 € → 57 € (+6 €) | 2025 |
Île-de-France | 54,95 | Stable | — |
Nouvelle-Aquitaine | 53 | 45 € → 53 € (+8 €) | 2025 |
Martinique | 53 | +30 € | 2025 |
Pays de la Loire | 51 | Stable | — |
Auvergne-Rhône-Alpes | 43 | Stable | — |
Corse | 43 | 27 € → 43 € (+16 €) | 2025 |
Guyane | 42,50 | Stable | — |
Hauts-de-France | 42 | 36,20 € → 42 € (+5,80 €) | Mars 2025 |
Guadeloupe | 41 | Stable | — |
Mayotte | 30 | Tarif le plus bas | — |
Une dématérialisation qui désoriente
Derrière cette évolution tarifaire, c’est aussi l’architecture du service public de l’immatriculation qui interroge. Depuis la fermeture définitive des guichets en préfecture en novembre 2017 dans le cadre du "Plan Préfectures Nouvelle Génération", les usagers doivent impérativement passer par la plateforme numérique de l’Agence nationale des titres sécurisés (ANTS).
Or, cette centralisation numérique se heurte à de nombreuses difficultés. Bugs techniques récurrents, impossibilité de corriger les erreurs de saisie, saturation des serveurs aux heures de pointe, interface peu intuitive : autant de dysfonctionnements qui transforment une démarche administrative en véritable parcours d’obstacles. Les délais de traitement sont aléatoires et parfois très longs. Un usager témoigne avoir attendu plus de deux mois sans recevoir sa carte grise, ce qui l’empêche de stationner légalement.
Une assistance publique à bout de souffle
Le numéro national 34 00, censé suppléer l’absence de guichet physique, ne remplit pas son rôle. Les appels s’accumulent, les temps d’attente dépassent souvent la demi-heure, et les réponses apportées restent génériques, inadaptées aux cas complexes. Les usagers n’ont aucun moyen de joindre directement le service instructeur. Les agents eux-mêmes reconnaissent être mal formés aux dossiers sortant des schémas standards.
Face à cette impasse, plusieurs alternatives ont vu le jour, sans toujours répondre aux attentes.
Les points d’accueil numérique installés en préfecture, animés par des jeunes en service civique, visent à soutenir les usagers dans leurs démarches en ligne. Ces structures, bien que louables, se heurtent à des horaires restreints, à une formation parfois insuffisante des médiateurs et à un matériel inadapté à l’affluence. Le dispositif reste par ailleurs limité dans de nombreuses zones rurales.
Le réseau des Maisons France Services propose un accompagnement plus structuré, avec la possibilité de créer un compte ANTS, de scanner les pièces du dossier et de bénéficier d’une aide humaine. Mais là encore, les ressources sont insuffisantes pour répondre à la demande, et la couverture du territoire est loin d’être homogène.
Une délégation croissante au privé
Face aux lenteurs du service public, de nombreux automobilistes choisissent de faire appel à des prestataires privés agréés. Ces entreprises facturent la réalisation des démarches administratives, transformant de facto un service public gratuit en service marchand. Cette tendance soulève des interrogations sur l’égalité d’accès : seuls les usagers disposant des moyens financiers nécessaires peuvent échapper à l’enlisement administratif. Par ailleurs, certains sites peu scrupuleux prolifèrent en ligne, entretenant un marché parallèle parfois frauduleux.
Les cas les plus critiques révèlent les limites du système
Les dossiers atypiques – successions, véhicules importés, changements d’état civil – illustrent les limites de l’automatisation du traitement. Ces situations requièrent un accompagnement humain, aujourd’hui inexistant. Dans ces cas, le blocage est souvent total. Une erreur de saisie ou un document mal interprété par l’algorithme peut bloquer un dossier pendant plusieurs mois, sans recours possible.
Les délais sont d’autant plus critiques que le certificat provisoire d’immatriculation n’est valable que 30 jours. Une fois ce délai écoulé, le conducteur se trouve en situation d’irrégularité, exposé à des amendes pouvant aller jusqu’à 750 euros, voire à l’immobilisation du véhicule.
Des conséquences lourdes pour les plus fragiles
La dématérialisation touche de plein fouet les publics les plus vulnérables : personnes âgées peu familiarisées avec le numérique, usagers en situation de handicap, personnes illettrées ou résidant dans des zones blanches. Le coût humain est difficile à quantifier, mais les témoignages convergent : des journées entières perdues, des déplacements à répétition, un sentiment d’abandon.
Cette exclusion numérique produit aussi des effets économiques indirects : perte de temps, recours à des prestataires payants, amendes, impossibilité d’utiliser son véhicule pour travailler ou se soigner.
Nouvelles taxes, nouvelles contraintes
Autre nouveauté en 2025 : la fin de la gratuité pour les véhicules électriques dans la quasi-totalité des régions. Depuis le 1er mai, seuls les Hauts-de-France conservent une exonération. Le coût pour les automobilistes est estimé à 640 millions d’euros. Parallèlement, le malus écologique est durci : le seuil de déclenchement est abaissé à 113 g de CO2/km (contre 118 g en 2024), et le montant maximal atteint désormais 70 000 euros. Deux véhicules sur trois sont concernés.