La société grenobloise Kalray, spécialiste des processeurs de données (DPU), vient de franchir une nouvelle étape stratégique en concluant un deuxième accord majeur avec l’entreprise espagnole Openchip, positionnée sur l’accélération matérielle pour l’intelligence artificielle (IA) et le calcul haute performance (HPC). Cette nouvelle collaboration s’accompagne d’un financement de 10 millions d’euros, offrant à Kalray une bouffée d’oxygène financière, mais aussi une perspective industrielle nouvelle.
Ce partenariat s’inscrit dans la volonté des deux entreprises de développer une version optimisée du DPU Kalray, spécifiquement conçue pour les centres de données IA, un marché en plein essor où la présence européenne reste encore marginale.
Un transfert d’activité inédit
Point central de cet accord : un transfert temporaire d’activité sur une durée de douze mois. Environ cinquante salariés de Kalray seront pris en charge par Openchip via un contrat de location-gérance, un mécanisme rarement utilisé dans le secteur technologique. Il permet à la PME grenobloise de réduire significativement ses charges salariales tout en poursuivant ses travaux de R&D.
Ce nouvel accord complète une première étape du partenariat, conclue fin mai, et portant sur une licence technologique de 4 millions d’euros.
Cette alliance est pensée comme un partenariat industriel structurant, à la croisée de plusieurs enjeux : technologique, économique et politique. Kalray et Openchip veulent mutualiser leurs expertises pour s’implanter durablement sur le marché des semi-conducteurs spécialisés dans l’IA, encore largement dominé par les géants américains et asiatiques.
Le partenariat va potentiellement plus loin : une entrée d’Openchip au capital de Kalray est envisagée, voire une prise de contrôle complète, bien que cette option reste à l’étude. Pour Éric Baissus, ce scénario n’est pas perçu comme une menace, mais comme une évolution stratégique possible :
Objectif 2026 : recentrage total sur les semi-conducteurs
Durement touchée en 2024 par une importante restructuration, Kalray cherche désormais à rebondir. La société a cédé en février sa branche logicielle, qui pesait plus de 80 % des 24 millions d’euros de chiffre d’affaires annuel. Cette opération, si elle allège les charges, entraîne toutefois une baisse anticipée de 35 % de revenus en 2025.
Face à ce choc, la direction affirme vouloir concentrer tous ses efforts sur son cœur de métier : les semi-conducteurs. Un pari ambitieux : alors que cette activité ne représentait que 3 millions d’euros en 2024, Kalray table sur 15 millions en 2025, porté par la demande croissante en puces IA.
Pour soutenir cette croissance, une vingtaine de recrutements sont prévus dans les mois à venir, y compris des sous-traitants, portant l’effectif total à environ 150 collaborateurs.