Bruno Retailleau dévoile son plan contre la cybercriminalité

Face à la hausse de 40 % des actes de cybercriminalité, le ministère de l’Intérieur lance une stratégie en 4 axes pour sécuriser le cyberespace.

Face à l’explosion des actes de cybercriminalité, le ministère de l’Intérieur lance une stratégie inédite pour structurer la réponse des forces de sécurité. Quatre piliers guideront l’action publique sur les trois prochaines années.

Entre 2019 et 2023, les faits de cybercriminalité recensés par les autorités ont connu une augmentation de 40 %. En ligne de mire : attaques contre les systèmes d’information, vols de données, escroqueries, cyberharcèlement, mais aussi des formes plus graves comme la pédopornographie ou les trafics sur le Darkweb. Dans un contexte de forte hybridation entre criminalité organisée, activisme politique et enjeux géopolitiques, le cyberespace est devenu un nouveau théâtre d’opérations pour des acteurs parfois invisibles, souvent transnationaux.

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Pour faire face à cette menace protéiforme, le ministère de l’Intérieur a présenté sa première stratégie ministérielle de lutte contre la cybercriminalité, portée par Bruno Retailleau, ministre délégué auprès du ministre de l’Intérieur et des Outre-mer.

Ce cadre d’action de trois ans – évolutif selon les ruptures technologiques à venir – a été conçu sous la houlette du Commandement du ministère de l’Intérieur pour le cyberespace (COMCYBER-MI). Il s’articule avec la stratégie nationale de cybersécurité, tout en excluant le périmètre réservé de la Direction Générale de la Sécurité Intérieure (DGSI). Les directions opérationnelles – Gendarmerie nationale (DGGN), Police nationale (DGPN) et Préfecture de Police (PP) – seront chargées de le décliner en plans d’action concrets.

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Quatre piliers pour une stratégie complète

Anticipation et résilience : voir venir pour mieux résister
Ce premier axe vise à améliorer la détection précoce des menaces, à renforcer la connaissance des groupes criminels et à mieux gérer les crises cyber. Un rapport annuel sur l’état de la menace sera publié, et des retours d’expérience (RETEX) seront systématiquement exploités. Le recours aux outils de renseignement cyber, à la veille technologique et à l’analyse des sources ouvertes (OSINT) sera accru.

Une réponse opérationnelle renforcée sur tous les fronts
Le second pilier prévoit un renforcement massif des capacités d’enquête des forces de sécurité intérieure (FSI). Cela passe par une collaboration renforcée avec le public et les plateformes numériques (jeux en ligne, e-commerce, metavers), la promotion des dispositifs existants comme « 17 Cyber », ainsi que la lutte ciblée contre les trafics illicites, les atteintes aux mineurs, le cyberharcèlement ou encore le blanchiment via crypto-actifs.
L’usage de l’intelligence artificielle devient central. Le programme CyberIA permettra de traiter les données massives pour optimiser la réponse judiciaire.

Partenariats, coopération internationale et pilotage stratégique
Consciente du caractère transfrontalier de la cybercriminalité, la stratégie mise sur une intensification des coopérations européennes et internationales (Europol, ECTEG), ainsi qu’avec le secteur privé et le monde universitaire. Un tableau de bord de performance accompagnera les actions, avec des indicateurs de résultats et une évaluation de la qualité du service public rendu. L’adaptation du cadre juridique national et international est également envisagée comme levier d’action.

Compétences et attractivité : le nerf de la guerre
Dans un marché hautement concurrentiel, attirer et fidéliser les talents spécialisés constitue un défi central. La stratégie prévoit des campagnes de recrutement ciblées, des partenariats avec les écoles du numérique, des concours techniques (type Capture The Flag), et la montée en puissance des formations initiales et continues.
Le ministère envisage également une révision des grilles salariales et une mobilité facilitée entre services pour renforcer l’attractivité des carrières cyber.

Un pilotage et un suivi réguliers

La mise en œuvre de la stratégie sera suivie par un comité de pilotage (COPIL), réunissant les services contributeurs deux fois par an, tandis qu’un comité stratégique (COSTRAT) présidé par le directeur de cabinet du ministre se réunira une fois par an. Ces instances auront pour mission de mesurer les résultats, de corriger le cap si nécessaire, et de garantir une adaptation constante face à des technologies en évolution rapide, comme l’intelligence artificielle ou l’informatique quantique.


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