Sam Altman (OpenAI), le Steve Jobs de l’intelligence artificielle

Il dirige l’entreprise à l’origine de ChatGPT, conseille les gouvernements, construit des infrastructures à 500 milliards de dollars, et conçoit le nouveau type d’appareil intelligent qui remplacera le smartphone. Qui est vraiment Sam Altman ?

Le 22 mai dernier, Sam Altman a présenté à ses équipes un dispositif inédit conçu avec Jony Ive, ancien directeur du design chez Apple. Ce produit, encore en phase de développement, est conçu pour être un “compagnon IA” : un objet physique intégrant les technologies d’OpenAI, destiné à accompagner l’utilisateur dans ses usages quotidiens. Le projet fait suite à l’acquisition de la startup io pour 6,5 milliards de dollars.

L’objectif affiché est de distribuer jusqu’à 100 millions d’unités. Selon Altman, ce projet pourrait à terme générer jusqu’à 1 000 milliards de dollars de valeur pour OpenAI. Il marque une volonté de transformer l’IA en un produit personnel intégré, au-delà du modèle logiciel actuel.

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Un parcours de fondateur technologique précoce

Né en 1985 à Chicago, Sam Altman grandit dans le Missouri, où il découvre l’informatique dès l’âge de huit ans. Il étudie brièvement à Stanford avant de co-fonder Loopt en 2005, une application de géolocalisation sociale, vendue sept ans plus tard pour 43,4 millions de dollars.

En 2011, il rejoint Y Combinator, l’un des incubateurs les plus influents de la Silicon Valley. Il en devient président en 2014. Il y déploie une stratégie d’expansion ambitieuse : soutien à la “deep tech”, augmentation massive du nombre de startups financées, et création de nouveaux véhicules d’investissement comme YC Fellowship et YC Continuity Fund.

ChatGPT et OpenAI : le choc de l’intelligence artificielle générative

En 2019, Altman devient PDG d’OpenAI. À l’origine non-lucrative, l’organisation devient une société à but lucratif plafonné (capped-profit), afin de lever les fonds nécessaires à ses ambitions. En novembre 2022, le lancement de ChatGPT propulse OpenAI au premier plan du paysage technologique mondial.

En avril 2025, OpenAI revendique 800 millions d’utilisateurs actifs mensuels. Les revenus devraient atteindre 12,7 milliards de dollars cette année. Altman annonce en janvier que son organisation sait “comment construire l’AGI” (intelligence artificielle générale), et se concentre désormais sur l’étape suivante : la superintelligence.

Le 21 janvier 2025, Altman annonce Stargate, un projet de 500 milliards de dollars sur quatre ans visant à construire une vingtaine de centres de données de très grande capacité. Financé par SoftBank, Oracle, Microsoft, MGX et soutenu par l’État fédéral, Stargate incarne la stratégie d’Altman : assurer la souveraineté computationnelle américaine face à la Chine.

La première infrastructure est en construction à Abilene (Texas). Le 22 mai, Altman confirme l’extension de Stargate aux Émirats arabes unis, avec le projet Stargate UAE à Abu Dhabi. Cette initiative, intitulée OpenAI for Countries, propose des infrastructures IA clés-en-main aux États partenaires.

Gouvernance hybride et modèle économique plafonné

Depuis mai 2025, Altman a réaffirmé qu’OpenAI conserverait une structure hybride : la société à but lucratif plafonné reste contrôlée par une entité non-lucrative fondatrice. Ce choix vise à équilibrer croissance commerciale et mission de service public.

La dernière levée de fonds de 40 milliards de dollars, menée par SoftBank, valorise OpenAI à 300 milliards. Une clause prévoit une réduction de cette valorisation de 10 milliards si OpenAI ne devient pas une société 100 % lucrative d’ici fin 2025. Cette pression crée des tensions internes sur l’évolution de la gouvernance.

Altman a également nommé Fidji Simo (ex-Instacart) comme directrice des applications. Cette nouvelle répartition des rôles lui permet de se concentrer sur la recherche, la sécurité et la stratégie produit.

Bataille Sam Altman et Elon Musk autour du futur de l’IA

Altman entretient depuis 2018 une opposition directe avec Elon Musk, cofondateur d’OpenAI. Musk a quitté l’organisation après une proposition de fusion avec Tesla refusée par le conseil. Il accuse aujourd’hui OpenAI d’avoir trahi sa mission initiale en devenant une entreprise fermée et lucrative.

En 2024 et 2025, Musk dépose plusieurs plaintes contre OpenAI, et propose en février 2025 de racheter sa structure fondatrice pour 97,4 milliards de dollars. L’offre est refusée. Altman y réagit par une publication ironique sur X (anciennement Twitter), intensifiant un conflit devenu à la fois juridique et médiatique.

L’Orb et Worldcoin : vers une vérification biométrique mondiale

En parallèle de ses activités chez OpenAI, Altman cofonde Tools for Humanity, qui développe l’Orb, un scanner d’iris permettant de générer une identité biométrique unique. Cette technologie vise à authentifier les utilisateurs humains dans un environnement numérique de plus en plus peuplé d’agents IA.

Les utilisateurs enregistrés reçoivent des jetons Worldcoin, cryptomonnaie adossée à ce système. Le dispositif est présenté comme une solution à long terme pour garantir la vérifiabilité en ligne à grande échelle. Il suscite toutefois des critiques sur la centralisation des données biométriques.

Altman soutient plusieurs politiques redistributives liées à l’automatisation. Il défend un revenu universel financé par l’IA, propose l’accès universel à la puissance de calcul (universal basic compute) et soutient une taxation de la valeur foncière.

Il adopte une stratégie politique transpartisane : soutien à Andrew Yang, Joe Biden, Dean Phillips, puis don de 1 million de dollars au Fonds inaugural de Donald Trump en décembre 2024. Ce positionnement lui permet de maintenir le dialogue avec les acteurs clés des deux partis sur les enjeux liés à la régulation de l’IA.

En parallèle, Altman déclare depuis 2016 être préparé à d’éventuels scénarios de crise majeure : il affirme posséder des ressources de survie, un terrain sécurisé et un stock de médicaments et équipements de protection. Ces déclarations, régulièrement reprises dans les médias, illustrent sa sensibilité aux risques systémiques liés à la technologie.

Une stratégie orientée produit à l’échelle globale

Sam Altman poursuit une trajectoire singulière dans la Silicon Valley : ni ingénieur pur, ni financier, il s’impose comme un concepteur de produits technologiques systémiques. Il associe développement logiciel, déploiement industriel, structuration politique et diversification des interfaces.

Son alliance avec Jony Ive pour créer un appareil physique basé sur l’IA est perçue comme une tentative de transformer l’IA en artefact personnel de masse, suivant une logique comparable à celle d’Apple dans les années 2000.


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