Grève des taxis : vers un blocage de Roland Garros

Taxis en colère, routes bloquées, tournoi perturbé : Roland-Garros commence dans une atmosphère explosive.

Ce dimanche 25 mai, les premiers échanges de balle résonnent à Roland-Garros. Mais à l’extérieur des courts, une autre confrontation se joue, bien plus tendue. Depuis six jours, les taxis sont en grève. Ce matin encore, ils menacent de bloquer le tournoi. En ligne de mire : la réforme du transport sanitaire et la concurrence des VTC. En privé, plusiuers membres du gouvernement redoutent un effet « gilets jaunes » : une colère sectorielle qui cristallise une exaspération bien plus large.

A LIRE AUSSI
Les premiers taxis autonomes d’Uber circuleront en Europe dès 2026

Le tournoi en otage

« Nous allons nous occuper de Roland-Garros. » Cette phrase, lancée samedi 24 mai sur franceinfo par Emmanuelle Cordier, présidente de la Fédération nationale des taxis (FNDT), a résonné comme un avertissement. Quelques heures avant sa rencontre avec le Premier ministre François Bayrou, elle a maintenu le flou sur les actions prévues : « On ne va pas vous le dire », a-t-elle lâché, tout en évoquant des chauffeurs « relativement mobiles » et « relativement ingénieux ». Une menace volontairement nébuleuse, mais parfaitement calibrée.

L’intersyndicale a posé ses jalons : préavis de grève jusqu’au 30 mai à Paris, Marseille, Pau, et un plan de blocage des aéroports de Roissy et d’Orly à partir du lundi 26. Objectif : frapper là où ça se voit. Et aujourd’hui, c’est Roland-Garros qui est au centre de toutes les caméras.

Logistique en surchauffe

Face aux menaces, la Fédération française de tennis a appelé les spectateurs à emprunter les transports en commun. Pas simple : la ligne 9 du métro, axe clé pour rejoindre la porte d’Auteuil, sera fermée les 31 mai et 1er juin pour maintenance. Déjà ce matin, les autorités recommandent aux fans d’arriver « très en avance » pour éviter les blocages filtrants. À la fluidité du jeu s’oppose le désordre des accès.

Le fond du conflit reste inchangé : une réforme du transport sanitaire qui impose un tarif forfaitaire de 13 euros par course, avec un barème kilométrique ajusté. Pour les taxis ruraux, cela pourrait entraîner une perte de 30 à 40 % du chiffre d’affaires. Dans certaines zones, les trajets médicaux représentent jusqu’à 85 % de l’activité.

À cela s’ajoute la concurrence des VTC, accusés de jouer avec des règles plus souples et des tarifs dynamiques. Les syndicats dénoncent une asymétrie croissante. Depuis plus d’un an, ils demandent une régulation harmonisée. Sans réponse.

Mobilisation à géométrie variable

Depuis le 19 mai, environ 1 700 taxis se mobilisent chaque jour en France, dont près de 960 à Paris. Les actions se multiplient : blocage de la Gare de Lyon, barrages filtrants à Marseille, embouteillages en cascade sur les autoroutes d’Île-de-France. À Pau, les chauffeurs campent devant le domicile du Premier ministre. À Paris, le boulevard Raspail est devenu un symbole. Et ce matin, les regards se tournent vers les accès à Roland-Garros.

La contestation s’est durcie. À Paris, des affrontements ont éclaté place Denfert-Rochereau. Gaz lacrymogènes, soixante-quatre interpellations. Devant le ministère des Transports, des tentes ont été plantées. Les chauffeurs s’installent dans la durée. « On est à bout », lâche un manifestant lyonnais. Son chiffre d’affaires aurait chuté de 60 % en un an. « On nous impose une tarification urbaine alors qu’on travaille à la campagne. »

L’Assurance maladie, de son côté, maintient sa ligne : « La majorité des taxis seront gagnants », surtout dans les zones urbaines. Elle défend une réforme qui vise à rationaliser le système, notamment en regroupant les patients et en limitant les trajets à vide.

L’État inflexible, le bras de fer continue

Le gouvernement reste droit dans ses bottes. Lors d’une réunion de crise samedi au ministère des Transports, aucune concession n’a été faite. « Il n’y aura pas de retour en arrière », martèle la porte-parole du gouvernement, Sophie Primas. La réforme est censée faire économiser entre 100 et 150 millions d’euros en six ans. Une économie modeste au regard du budget global, mais un symbole de rigueur budgétaire revendiqué.


Partagez votre avis