Assurance santé animale : la France à la traîne malgré un marché en plein boom

Avec seulement 35% d’animaux assurés, la France reste en retard malgré un marché en pleine explosion et des frais vétérinaires de plus en plus lourds.

Les Français adorent leurs animaux, mais boudent encore trop souvent l’assurance santé animale. Un paradoxe que les professionnels peinent à expliquer, alors que le marché connaît une croissance fulgurante. La France peut-elle rattraper ses voisins européens d’ici 2033 ?

Le paradoxe français : entre passion animale et retard assurantiel

Un foyer français sur deux possède un animal de compagnie. Avec près de 80 millions d’animaux domestiques, la France figure parmi les champions européens de l’attachement affectif. Pourtant, lorsqu’il s’agit d’assurer la santé de leurs compagnons, les Français restent en retrait.

En 2025, seuls 35% des propriétaires ont souscrit une assurance santé animale, contre 80% en Suède et entre 40 et 85% au Royaume-Uni. Un contraste saisissant qui interroge : comment expliquer cette frilosité, alors même que les frais vétérinaires explosent et que le marché affiche une croissance à deux chiffres ?

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Marché 2025 : des chiffres qui donnent le vertige

Le marché français de l’assurance santé animale est en pleine expansion. Évalué à 1,8 milliard de dollars en 2023, il devrait atteindre 4,9 milliards d’ici 2033, avec un taux de croissance annuel composé de 10,51%, selon les dernières estimations.

Les propriétaires prennent peu à peu conscience de la réalité économique des soins vétérinaires. En moyenne, un chien coûte 584 euros par an à son maître, un chat 429 euros, sans compter les interventions lourdes ou les maladies chroniques.

Cette prise de conscience se traduit par une progression régulière des souscriptions. Porté par une dynamique positive, le taux de pénétration a gagné plusieurs points ces dernières années, même s’il reste inférieur à celui observé chez nos voisins.

Qui tire le marché vers le haut ? Portrait des acteurs clés

Le paysage concurrentiel s’organise autour de deux grandes familles d’acteurs.

D’abord, les historiques, avec SantéVet en tête, leader incontesté du marché français. La société affiche une croissance annuelle de 15%, avec 189 000 contrats actifs et un chiffre d’affaires de 69 millions d’euros. SantéVet capte à lui seul près de la moitié des parts de marché.

Face à ces mastodontes, une nouvelle génération d’assurtechs bouscule les codes. Dalma, par exemple, propose une plateforme 100% digitale et a levé 20 millions d’euros en mars 2025 pour accélérer son développement. La startup revendique déjà 65 000 animaux assurés, avec une croissance de 100% en 2024.

D’autres acteurs émergent, à l’image de Fidel’AmiSanté, Otherwise, Lovys ou encore Kozoo, née à La Rochelle en 2020. Ces nouveaux entrants misent sur des formules simplifiées, des prix accessibles – à partir de 5,44 euros par mois – et des services innovants : consultations vétérinaires en ligne, contenus éducatifs, ou remboursement de cotisations si aucun soin n’a été nécessaire.

Pourquoi les Français restent frileux ? Analyse des freins culturels et économiques

Malgré cette offre florissante, la France reste à la traîne en matière d’assurance animale. Plusieurs facteurs expliquent ce retard.

La culture d’abord : l’assurance santé animale est un réflexe ancien en Suède, où elle est institutionnalisée depuis plusieurs décennies. Au Royaume-Uni, les vétérinaires jouent un rôle clé en incitant leurs clients à souscrire une assurance. Ce rôle reste marginal en France, où la recommandation des professionnels est encore trop rare.

Autre frein majeur : la perception de l’assurance comme une dépense superflue. De nombreux propriétaires ignorent l’étendue des garanties possibles et les bénéfices financiers à long terme. La diversité des offres, souvent mal comprises, ajoute à la confusion.

Soigner coûte cher : les risques vétérinaires qui devraient convaincre

Pourtant, les risques sont bien réels et les coûts parfois vertigineux. Le retournement d’estomac, fréquent chez les grands chiens, peut coûter jusqu’à 3 000 euros. Une fracture nécessitant chirurgie et rééducation atteint facilement 1 700 euros. Quant aux traitements contre le cancer ou les tumeurs, ils dépassent souvent 1 500 euros, notamment pour la radiothérapie.

« Beaucoup de propriétaires sont pris de court lorsqu’un accident survient, témoigne le Dr Sophie Morel, vétérinaire à Lyon. Les soins lourds peuvent vite devenir inaccessibles sans assurance. C’est souvent à ce moment-là qu’ils découvrent les limites de leur budget. »

Les leviers pour rattraper le retard français

Face à ces enjeux, les professionnels redoublent d’efforts pour rendre l’assurance plus attractive.

La digitalisation est en première ligne. Les plateformes comme Dalma ou Kozoo simplifient l’accès à l’assurance et améliorent l’expérience client grâce à des parcours 100% en ligne. Les services à forte valeur ajoutée – comme les consultations vétérinaires gratuites à distance ou le cashback en cas d’absence de sinistre – séduisent de plus en plus d’utilisateurs.

Les assureurs misent aussi sur la pédagogie. Ils multiplient les campagnes d’information pour sensibiliser les propriétaires aux coûts des soins et aux bénéfices de l’assurance.

« Le marché évolue vite, mais il faut encore franchir un cap culturel », estime Pierre Dubois, expert du secteur. « Les vétérinaires, les distributeurs et les assureurs doivent travailler ensemble pour faire de l’assurance une évidence, comme cela se fait en Suède depuis longtemps. »


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