Baignade dans la Seine à Paris : la vérité derrière les promesses officielles

Paris promet une Seine baignable dès cet été, mais entre pollution, météo et assainissement fragile, la réalité pourrait être bien moins idyllique.

C’est devenu la carte postale rêvée des communicants parisiens : des Parisiens bronzant sur les quais, les pieds dans l’eau, à deux pas de Notre-Dame. Une image savamment orchestrée, dont les premières scènes se sont jouées à l’été 2024 avec les épreuves olympiques de triathlon dans la Seine. La maire de Paris, Anne Hidalgo, et la ministre des Sports, Marie Barsacq, n’ont pas manqué de s’en féliciter, martelant que « la Seine est désormais baignable ».

Une affirmation martiale… mais fragile. Car s’il a suffi d’un été olympique pour valider politiquement le chantier, il suffira d’un été pluvieux pour rappeler que la Seine, malgré les milliards dépensés, reste un fleuve urbain, à la merci de ses réseaux d’assainissement et des caprices du ciel. Les ingénieurs le savent, les experts aussi, mais la communication officielle préfère les images de nageurs que celles des égouts qui débordent.

A LIRE AUSSI
Chasse aux voitures dans Paris : une ZTL pour transformer l’hypercentre

Derrière les promesses, des milliards engloutis… pour quelle garantie ?

Depuis 2016, plus de 1,1 milliard d’euros a été englouti – littéralement – dans la modernisation des systèmes d’assainissement franciliens. Une somme record, vendue comme la preuve d’une volonté sans faille. Pourtant, même les porteurs du projet reconnaissent que la baignade « ne sera pas garantie tous les jours ».

Autrement dit, malgré les chiffres impressionnants :

  • 40 % de rejets d’eaux usées en moins,
  • 5000 branchements sauvages corrigés,
  • 260 péniches enfin raccordées,
  • 36 espèces de poissons recensées,

… rien ne permet d’affirmer avec certitude que l’eau sera toujours conforme aux normes sanitaires. Un détail que la mairie oublie soigneusement dans ses communiqués victorieux, préférant parler « d’héritage écologique » sans évoquer les jours de fermeture probable.

Baignade 2025 : trois sites ouverts… sauf quand la météo dira non

Le 5 juillet 2025, trois sites ouvriront à Paris, nous promet-on : au pied de l’île Saint-Louis, face à la Tour Eiffel, et dans le quartier de Bercy. Trois bassins « gratuits et sécurisés », selon la Ville. Mais il faudra vérifier chaque matin si les drapeaux sont au vert, ou si les bactéries Escherichia coli et entérocoques ont, une fois de plus, contraint les autorités à interdire l’accès.

« La baignade sera strictement encadrée », assure la mairie. Traduction : elle sera autorisée à condition que le fleuve soit, ce jour-là, conforme aux seuils européens. Et si la pluie vient saturer les réseaux, les baigneurs pourront toujours se consoler en regardant passer les bateaux-mouches.

Officiellement, tout le monde est gagnant : les nageurs retrouvent le fleuve, les professionnels continuent à naviguer. Officieusement, les transporteurs fluviaux grincent des dents. Les plages horaires de navigation ont été restreintes, les négociations difficiles, notamment autour du Bras Marie. Mais ces tensions-là ne figurent dans aucun discours triomphal. Le récit officiel préfère parler de « victoire collective ».

Une extension à venir… mais à quel prix ?

Derrière Paris, la Métropole du Grand Paris tente de vendre un avenir encore plus vaste : baignades à Sèvres, à Saint-Denis, et pourquoi pas sur tout le parcours olympique d’ici 2028. Mais à quel coût écologique et financier ? Et pour quel usage réel, si l’eau reste imprévisible dès la première averse ? Là encore, les annonces pleuvent plus vite que les garanties.

On nous promet une Seine réinventée, une qualité de vie renforcée, un espace public retrouvé. Mais à y regarder de plus près, l’opération sent la communication bien huilée. Une vitrine olympique présentée comme une transformation durable, alors que la baignade quotidienne reste, elle, suspendue à la météo et aux limites d’un système d’assainissement sous tension.


Partagez votre avis