Face à la profusion des réseaux sociaux, des messageries instantanées et des notifications push, l’emailing semble à contre-courant. Et pourtant, en 2025, ce canal continue d’afficher une rentabilité sans équivalent. Avec 376,4 milliards de courriels échangés chaque jour dans le monde, l’email reste le socle invisible, mais solide, de la communication digitale. Entre atouts technologiques, défis réglementaires et saturation croissante, état des lieux d’un outil en mutation permanente.
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L’email, toujours au cœur de la stratégie
En dépit de l’explosion des canaux numériques, l’email reste central dans les usages quotidiens, aussi bien professionnels que personnels. Le nombre d’utilisateurs d’email devrait atteindre 4,594 milliards cette année, et la France se positionne au 4ᵉ rang mondial, à égalité avec les Pays-Bas et le Royaume-Uni, avec 8,3 milliards de courriels envoyés chaque jour.
Un succès qui s’explique par des usages profondément ancrés : 70 % des utilisateurs consultent leur boîte mail principale plusieurs fois par jour. Mieux : 65 % d’entre eux estiment qu’ils ne pourraient tout simplement pas s’en passer. Dans ce contexte, l’email marketing reste, pour de nombreuses entreprises, un levier incontournable.
Pourquoi l’emailing fonctionne (encore) si bien
ROI exceptionnel et acquisition ultra-performante
S’il persiste, c’est d’abord parce qu’il rapporte gros. Selon Statista (mars 2025), chaque euro investi dans l’emailing génère 42 € en moyenne. Un retour sur investissement bien supérieur aux réseaux sociaux ou au SEA, pourtant en forte croissance. 41 % des professionnels du marketing le désignent comme leur canal le plus performant.
Autre atout : son pouvoir d’acquisition. L’email serait 40 fois plus efficace que Facebook ou Twitter pour convertir un prospect en client.
Automatisation et personnalisation au service de la performance
En 2025, l’emailing bénéficie pleinement des apports de l’IA. Les campagnes sont automatisées, scénarisées, prévisibles, mais aussi hautement personnalisées : objets d’emails dynamiques, design responsive adapté à chaque profil, et envoi ajusté à l’horaire optimal de consultation.
Résultat : les emails personnalisés génèrent 6 fois plus de conversions que les messages génériques. L’automatisation, elle, permet de multiplier par 30 les revenus par destinataire par rapport aux newsletters classiques.
Un canal mesurable et préféré des consommateurs
Autre avantage : la précision des données. En 2025, le taux moyen d’ouverture des emails atteint 33,9 %, pour un taux de clic de 4,32 %, selon l’étude Brevo. Des outils intelligents permettent des tests A/B instantanés, des suggestions d’optimisation, voire des campagnes auto-ajustables.
Et contrairement à l’idée reçue, l’email reste le canal préféré de toutes les générations pour recevoir des communications commerciales :
- Baby-boomers : 74 %
- Génération X : 72 %
- Génération Y : 64 %
- Génération Z : 60 %
Un attachement qui s’explique par son caractère non intrusif et asynchrone, à rebours des messageries instantanées trop pressantes.
Limites et risques de l’emailing
Délivrabilité : un obstacle technique et réglementaire croissant
La première difficulté tient à la délivrabilité. Aujourd’hui, un message mal calibré risque rapidement de finir dans les spams, sapant toute la campagne. 48 % des professionnels déclarent que ce problème figure parmi leurs préoccupations majeures.
Les fournisseurs (Gmail, Yahoo) ont durci les règles. Depuis janvier 2025, ils exigent des émetteurs :
- Un taux de plaintes inférieur à 0,3 %
- Une option de désabonnement en un clic
- La mise en œuvre des protocoles SPF, DKIM et DMARC
Pourtant, près de la moitié des entreprises françaises ignorent encore ces nouvelles normes, selon une étude de Sinch Mailjet.
Saturation des boîtes de réception et fatigue des destinataires
Chaque jour, des centaines de courriels s’accumulent dans les boîtes des professionnels. Florian Silnicki, Président de LaFrenchCom, en reçoit jusqu’à 150 par jour, tous pertinents. Une surcharge qui réduit l’attention disponible et complique la tâche des marques pour capter l’intérêt.
Dans un tel contexte, se démarquer devient un art délicat, à la frontière entre fréquence maîtrisée et pertinence éditoriale.
Contraintes techniques et créatives
Contrairement aux publications sur les réseaux, un email envoyé ne peut plus être modifié. Une erreur d’objet ou de lien brisé devient irréversible. En parallèle, la multiplicité des clients de messagerie (Outlook, Gmail, Apple Mail…) complexifie la compatibilité technique.
Les emails interactifs, pourtant prometteurs, nécessitent un travail de conception plus lourd, des tests multiplateformes, et peuvent fragiliser l’éco-conception des contenus.
Enjeux éthiques et légaux
Le RGPD, le Digital Markets Act (DMA) et la future directive ePrivacy imposent une vigilance accrue sur la gestion des données personnelles. Double opt-in, désabonnement explicite, suppression des contacts inactifs : autant de pratiques encore insuffisamment adoptées. En 2025 :
- 57 % des entreprises n’ont pas mis en place le double opt-in
- 67 % ne nettoient pas leurs bases régulièrement
Des lacunes qui peuvent altérer la délivrabilité, mais surtout éroder la confiance des utilisateurs.
Vers un emailing du futur
Intégration omnicanale : la fin de l’email isolé
L’email n’est plus un canal autonome. Il s’intègre désormais dans des parcours clients globaux, mêlant SMS, chatbot, push notifications, voire communication vocale. Plus de 78 % des consommateurs attendent des marques une cohérence cross-canal dans leurs messages.
Les plateformes modernes permettent de centraliser ces interactions et de scénariser chaque point de contact avec finesse.
Interactivité et immersion au cœur des contenus
Les technologies AMP (Accelerated Mobile Pages) transforment les emails en mini-applications. Aujourd’hui, il est possible de :
- Ajouter un produit au panier
- Répondre à un sondage
- Modifier une commande
- Dialoguer avec un chatbot
Ces interactions augmentent les conversions de 30 à 40 %, tout en enrichissant l’expérience utilisateur.
Éthique, sobriété et consentement : un impératif stratégique
La fin des cookies tiers, la protection Apple Mail Privacy et la montée de la donnée « zero-party » imposent une nouvelle transparence dans les campagnes :
- Fin du tracking invisible
- Données déclaratives privilégiées
- Choix explicites de fréquence
Un changement de paradigme qui impose aux marques d’adapter le ton, le rythme et la finalité de leurs emails, au profit de la relation plutôt que la conversion immédiate.
Cas pratiques : succès inspirants et échecs révélateurs
Ceux qui réussissent
Les entreprises de taille intermédiaire (1 001 à 10 000 salariés) enregistrent les meilleures performances : taux d’ouverture à 35,5 % et taux de clic à 5,3 %. Le secteur du divertissement, dopé par l’émotion et l’exclusivité, dépasse même 46 % d’ouverture.
Certaines marques ont multiplié par deux leur taux de rétention en intégrant des fonctionnalités dynamiques dans leurs emails transactionnels : suivi de commande en direct, modification de livraison, questions via chatbot…
Ceux qui peinent à suivre
À l’inverse, le secteur du retail et de l’e-commerce souffre : saturation des messages, faible personnalisation, pression concurrentielle. Les grandes entreprises (10 000 salariés et plus) affichent aussi des taux de réactivité plus faibles, freinées par des approches trop standardisées.
Les échecs les plus fréquents :
- Objets mal calibrés
- Trop d’envois
- Mauvaise hygiène de la base
- Manque de ciblage comportemental
Trois réflexes peuvent améliorer la situation :
- Envoyer un correctif en cas d’erreur (objet, lien)
- Relancer les non-ouvreurs avec une variante
- Analyser les profils silencieux pour adapter la segmentation