Le Duff ou le patriotisme industriel à la française

Le Groupe Le Duff investit 100 millions d’euros à Falaise pour renforcer son pôle Bridor, alliant tradition boulangère française et stratégie d’exportation mondiale.

Quand l’industrie agroalimentaire prend racine dans les terroirs pour mieux pousser à l’international, cela donne le nouveau pari du Groupe Le Duff. En annonçant un investissement de 100 millions d’euros sur son site de Falaise, en Normandie, le géant français de la viennoiserie surgelée démontre une fois encore qu’il n’a pas renoncé à une certaine idée du capitalisme industriel — celui qui conjugue ancrage local et conquête globale.

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Bridor, le bras armé de Le Duff

Le choix de Falaise n’est pas anodin : un site déjà dans l’escarcelle du groupe via Frial, qui sera désormais reconfiguré pour accueillir Bridor, le bras armé de Le Duff dans le haut de gamme feuilleté. Deux lignes de production pour répondre à une demande européenne croissante, 150 emplois créés, une mise en service dès novembre 2025… Une partition bien orchestrée, avec en sourdine les subventions régionales (8 millions d’euros), qui traduisent la volonté politique de réindustrialiser les territoires sans trahir leur ADN.

Louis Le Duff, chef d’orchestre du groupe, insiste : « qualité » et « tradition boulangère » ne sont pas que des mots-valises. C’est là toute la subtilité de son modèle : avancer à grande vitesse sans perdre le goût du levain lent.

Patriotisme économique

Le Duff ne se contente pas de produire, il s’implante. L’approvisionnement ? Local. La farine vient de Normandie, les œufs du Grand Ouest. Même les emballages sont du cru. Une forme de patriotisme économique version boulangerie industrielle. Et dans cette logique de fidélité au territoire, les salariés actuels de Frial ne sont pas laissés pour compte : mobilité ou reconversion via le Campus Bridor. Ici, la mutation industrielle s’accompagne d’un projet humain — une denrée rare.

Mais ce projet normand n’est que la première levée d’un plan bien plus vaste. Aux États-Unis, Bridor étend déjà son emprise : Salt Lake City en 2026, Dallas en 2027, Philadelphie en pleine montée en puissance. En Australie, l’acquisition de Laurent Bakery sert de tête de pont. Partout, la même logique : produire au plus près, tout en gardant la main sur le savoir-faire.

Objectif 2030 : doubler le pôle industriel du groupe

Avec un objectif clair : 3,5 milliards d’euros de chiffre d’affaires en 2025, et le doublement du pôle industriel d’ici 2030. Une croissance maîtrisée, qui mise autant sur la pâte que sur les hommes — à grand renfort de formation continue et de recrutements mondiaux.

Derrière les viennoiseries, une stratégie économique se dessine : verticale, globale, mais enracinée. Le Duff. ne cherche pas seulement à croître. Il veut incarner une autre manière de penser l’industrie : plus locale, plus qualitative, et résolument tournée vers l’export. Le tout avec une vision à long terme, rare dans un secteur souvent dominé par le court-termisme et les effets de levier.


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