Droits de douane : vers une explosion du prix de l’iPhone

La nouvelle salve de droits de douane imposée par Donald Trump sur les produits en provenance d'Asie pourrait faire grimper le prix de l’iPhone de plusieurs centaines d’euros. Derrière ce choc tarifaire, c’est toute la stratégie industrielle d’Apple qui se retrouve sous pression.

L’administration Trump a signé, en avril 2025, un nouveau décret imposant des droits de douane massifs sur les produits importés depuis l’Asie. Objectif affiché : relocaliser la production sur le sol américain et réduire la dépendance stratégique aux chaînes d’approvisionnement étrangères. Mais ces mesures protectionnistes pourraient avoir un effet immédiat et tangible pour les consommateurs : faire grimper le prix de leur iPhone. Le smartphone conçu à Cupertino (Californie) se révèle extrêmement vulnérable aux barrières douanières.

L’iPhone et ses 200 fournisseurs

S’il est estampillé « Designed by Apple in California », l’iPhone est surtout un produit de la mondialisation. Derrière sa coque élégante se cache une chaîne de valeur impliquant plus de 200 fournisseurs dans une trentaine de pays. Son assemblage final, réalisé majoritairement en Chine par les sous-traitants Foxconn et Pegatron, ne représente qu’une fraction de sa valeur ajoutée — environ 4 %, selon plusieurs analystes.

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Les composants essentiels d’un iPhone proviennent de multiples territoires :

  • Écran tactile : Japon (Sharp) et Corée du Sud (Samsung, LG)
  • Processeur A17 : conçu en Californie, fabriqué par TSMC à Taïwan
  • Appareil photo : Japon (Sony) et États-Unis
  • Mémoire DRAM : Japon
  • Verre de protection : États-Unis (Corning)
  • Batterie : Corée du Sud et Chine

Cette architecture complexe permet à Apple d’optimiser ses coûts et sa flexibilité industrielle. Il faut en moyenne 72 heures pour qu’un iPhone assemblé en Chine soit livré dans un Apple Store à San Francisco.

Un choc tarifaire pour Apple

Le décret signé par Donald Trump marque un tournant protectionniste. Les nouveaux droits de douane frappent sévèrement les importations technologiques :

  • 34 % pour les produits chinois
  • 46 % pour le Vietnam
  • 26 % pour l’Inde

Apple, qui concentre encore 90 % de sa production matérielle en Chine, est en première ligne. Selon les estimations du cabinet Wedbush, ces mesures pourraient entraîner une hausse des coûts de fabrication de 40 à 50 %, soit un impact global de près de 40 milliards de dollars par an.

Un iPhone à 1 700 euros ?

Face à cette explosion des coûts, Apple n’a que deux options : absorber une partie du choc en réduisant ses marges, ou répercuter les hausses sur les consommateurs. Si la firme californienne opte pour la seconde solution, la facture pourrait grimper de façon significative :

  • Un iPhone 15 actuellement vendu 969 euros en France pourrait dépasse les 1 300 euros
  • Les modèles Pro Max pourraient dépasser les 1 700 euros

De telles augmentations pourraient affecter la demande, notamment dans les marchés sensibles au prix comme l’Europe ou l’Inde. Apple dispose encore de marges de manœuvre : avec des marges bénéficiaires autour de 45 %, elle pourrait absorber partiellement le choc tarifaire. Mais pour combien de temps ?

Inde, Vietnam, Arizona : Apple cherche une issue hors de Chine

Depuis plusieurs années, Apple cherche à réduire sa dépendance à la Chine. L’entreprise a déjà amorcé un mouvement vers l’Inde et le Vietnam, où des lignes d’assemblage supplémentaires ont été ouvertes. Elle a également investi dans une usine TSMC en Arizona, qui commence à produire des puces, mais à des volumes encore faibles et à des coûts bien supérieurs

La relocalisation prend du temps. « Produire un iPhone requiert une main-d’œuvre hautement qualifiée, une logistique sans faille et des écosystèmes industriels complets », rappelait récemment Tim Cook. Ce dont les États-Unis ne disposent pas encore à grande échelle. Parallèlement, Apple pourrait tenter de négocier avec ses fournisseurs ou de jouer sur ses structures comptables internationales pour atténuer l’impact tarifaire. Mais aucune de ces solutions n’est immédiate.

Apple à la croisée des chemins

Le retour du protectionnisme américain place Apple face à un dilemme. L’entreprise dispose d’atouts considérables : une image de marque puissante, une trésorerie de plus de 160 milliards de dollars et une expertise logistique reconnue. Mais elle se retrouve contrainte de repenser son modèle fondé sur la mondialisation fluide des flux de production.

À moyen terme, la guerre commerciale engagée par les États-Unis pourrait remodeler en profondeur les chaînes d’approvisionnement mondiales. Le rêve d’un « iPhone 100 % américain », longtemps repoussé, pourrait revenir sur la table. Au prix de profonds investissements et d’une transformation du tissu industriel.

Jusqu’où le consommateur suivra-t-il ?

Au-delà d’Apple, c’est le consommateur qui pourrait devenir l’arbitre final de cette reconfiguration. Acceptera-t-il de payer plus cher un produit identique, au nom de la souveraineté industrielle américaine ? Ou se tournera-t-il vers d’autres marques, moins exposées aux tensions sino-américaines ?


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