La Chine redémarre, mais pour combien de temps ?

La Chine relance la consommation début 2025, mais des failles profondes persistent. Immobilier, démographie et tensions géopolitiques fragilisent la reprise.

Alors que les grandes économies peinent à rallumer les moteurs de la consommation, la Chine envoie un signal inhabituel : une croissance des ventes au détail au début de l’année 2025. Le pays du Milieu surprend, une fois de plus, en déjouant les pronostics les plus prudents.

Plusieurs multinationales actives sur son territoire annoncent des résultats robustes, dans le luxe, l’électronique ou encore les services. De quoi redonner un peu d’oxygène à une économie mondiale anémiée. Mais sous ce regain spectaculaire, des fissures béantes demeurent. Endettement des ménages, crise immobilière persistante, vieillissement rapide de la population et climat géopolitique tendu : les failles structurelles n’ont pas disparu, elles se creusent. La reprise est là, mais elle marche sur une corde raide.

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Le retour de la consommation intérieure chinoise est palpable, surtout dans les grandes villes. On y observe une forme de rattrapage post-pandémique, avec une confiance qui revient. Mais cette reprise a ses limites. Le poids de la consommation dans le PIB reste faible, bien en deçà des standards occidentaux. L’économie chinoise reste encore trop dépendante de ses exportations et de ses investissements, et pas assez portée par sa demande intérieure. Ce rebond ne gomme pas les effets du ralentissement des dernières années ni les déséquilibres persistants de son modèle.

Le gouvernement a sorti l’artillerie lourde : subventions ciblées, incitations fiscales et soutien massif aux industries dites stratégiques. Ces mesures sont efficaces à court terme mais restent conjoncturelles. L’essentiel de ces leviers ne transforme pas en profondeur le modèle économique chinois. Les secteurs dynamiques – technologies vertes, santé, e-commerce – profitent de ces impulsions tandis que l’immobilier continue d’être un poids lourd pour l’économie. Or en Chine, quand l’immobilier vacille, c’est tout le système qui tremble.

La crise démographique et sociale, frein majeur à la relance chinoise

La démographie est sans appel : la Chine vieillit vite et voit son taux de natalité s’effondrer. Les inégalités régionales persistent tandis que le filet de sécurité sociale reste insuffisant. Ces dynamiques pèsent lourdement sur la consommation intérieure. Les jeunes générations précaires privilégient l’épargne à la dépense, freinant ainsi la reprise économique.

Les tensions commerciales avec les États-Unis exacerbent les défis économiques chinois. Depuis son retour à la Maison-Blanche, Donald Trump a imposé une série de tarifs douaniers agressifs sur les produits chinois (portés à 20 %), menaçant d’aller encore plus loin en avril. Ces mesures pourraient réduire le PIB chinois de 0,3 à 0,4 point en 2025. En réponse, Pékin a adopté des contre-tarifs ciblés sur des produits agricoles américains et imposé des restrictions sur des matières premières stratégiques comme les minéraux critiques.

La guerre commerciale entre Washington et Pékin affecte non seulement ces deux géants économiques mais aussi l’économie mondiale. L’OCDE prévoit une baisse du commerce mondial (-3,4 % d’ici 2030) et un ralentissement du PIB global (-0,5 %). Les effets inflationnistes aux États-Unis et ailleurs compliquent davantage la situation. Certains pays comme le Canada et le Mexique pourraient bénéficier d’une réallocation des flux commerciaux tandis que d’autres souffrent directement.

Malgré ces tensions, le marché chinois reste attractif pour les multinationales dans des secteurs comme le luxe ou la santé. Toutefois, le cadre réglementaire imprévisible – notamment sur les données et l’accès aux secteurs sensibles – représente un risque croissant pour les investisseurs étrangers.

Ce rebond conjoncturel ne saurait masquer la question essentielle : la Chine est-elle prête à transformer son modèle ? La montée en puissance de sa demande intérieure est lente et entravée par des obstacles structurels2. Par ailleurs, l’intensification des tensions avec Washington pourrait pousser Pékin à accélérer ses efforts vers l’indépendance technologique tout en renforçant ses politiques protectionnistes.


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