Comment certains fonds américains sortent leur argent de Russie avec l’aval de Poutine

Le président russe Vladimir Poutine a autorisé une poignée de sociétés de gestion américaines à céder leurs actifs bloqués en Russie depuis le début du conflit en Ukraine. Au coeur de cette opération se trouve un mystérieux hedge fund américain.

C’est un petit séisme : pour la première fois depuis l’invasion de l’Ukraine, le Kremlin autorise un groupe restreint de fonds américains à céder leurs actifs russes. Un feu vert limité, accordé à quelques privilégiés, qui marque un tournant dans la gestion des milliards d’investissements bloqués en Russie depuis 2022. Publié le 17 mars, soit la veille de l’entretien téléphonique entre Donald Trump et Vladimir Poutine, au cours duquel les deux dirigeants ont discuté d’un projet de cessez-le-feu en Ukraine, ce décret est le fruit de discussions au plus haut niveau entre la Maison Blanche et le Kremlin.

Un mystérieux hedge fund new-yorkais

L’opération financière est bien encadrée. Pas question d’ouvrir les vannes : onze sociétés triées sur le volet (six américaines, quatre britanniques et une singapourienne), parmi lesquelles Templeton Asset Management, Jane Street, GMO, Franklin Advisers et Carrhae Capital, vont pouvoir liquider leurs positions en Russie, via un intermédiaire unique : le hedge fund new-yorkais 683 Capital Partners (1,6 milliard de dollars d’actifs sous gestion), fondé par Ari Zweimann. Très discret, ce fonds d’investissement se retrouve au cœur de cette manœuvre soigneusement calibrée par Moscou. 683 Capital Partners a désormais l’autorisation d’acheter les actifs détenus par les fonds sélectionnés. Par la suite, l’entreprise new-yorkaise pourra les revendre à deux sociétés russes : Cepheus-2 et Modern Real Estate Funds. « Sans avoir besoin d’une autorisation supplémentaire de Poutine », précise Reuters.

Pourquoi maintenant ?

Le décret intervient à un moment particulier. Le marché russe a repris des couleurs. La Bourse de Moscou a dépassé ses niveaux d’avant-guerre, le rouble s’est redressé, et certains actifs, comme Lukoil et Sberbank, valent presque autant qu’avant le conflit. De quoi offrir une fenêtre de sortie plus avantageuse pour les investisseurs étrangers encore piégés en Russie. Mais cette largesse a ses limites : les gestionnaires d’actifs européens ne sont pas concernés. Un message clair du Kremlin : il discute avec Wall Street, mais pas avec Bruxelles et Berlin. Les 86 milliards de dollars d’actifs étrangers immobilisés restent donc encore un levier stratégique pour Moscou, tout comme les 300 milliards de dollars de réserves russes gelées en Occident.


Partagez votre avis