Yper développe son modèle de livraison de particuliers à particuliers

Créée en 2016 à Lille, la start-up Yper développe un service de livraison reposant sur la participation de particuliers. En s’appuyant sur une organisation décentralisée et un maillage territorial dense, l’entreprise entend proposer une alternative aux modèles classiques de livraison du dernier kilomètre. Elle revendique un positionnement fondé sur l’optimisation des trajets, la réduction des émissions de CO₂ et le soutien aux commerces de proximité.

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Un modèle fondé sur la cotransportation

Le principe consiste à faire appel à des particuliers, appelés « cotransporteurs », pour effectuer des livraisons ponctuelles. Ceux-ci peuvent être à pied, à vélo ou motorisés, et sont rémunérés environ 6 euros par course, dans la limite de 3 000 euros par an. Le cadre juridique repose sur une activité accessoire non professionnelle, conforme aux plafonds de revenus non imposables.

L’entreprise met en avant trois objectifs : rentabiliser les trajets existants des particuliers, limiter l’empreinte carbone des livraisons, et favoriser les circuits courts entre enseignes locales et consommateurs. Elle complète cette approche avec des dispositifs de click and collect, visant à mutualiser les flux de déplacement.

Déploiement territorial et volume d’activité

Yper revendique une présence dans plus de 7 500 communes en France. Le service est particulièrement développé en Seine-et-Marne, département dans lequel la start-up travaille avec une cinquantaine d’enseignes, dont Auchan, Leclerc, Intermarché ou Electro Dépôt. En 2024, près de 1 000 cotransporteurs y ont effectué 2 500 livraisons.

À l’échelle nationale, l’entreprise a enregistré 750 000 livraisons sur l’année. Elle indique avoir reversé 5 millions d’euros aux cotransporteurs, et disposer d’un réseau actif de plus de 450 000 particuliers âgés de 30 à 65 ans. Son réseau de partenaires commerciaux comprend environ 500 enseignes.

Selon les données communiquées par l’entreprise, les livraisons réalisées via cotransporteurs ont permis d’économiser l’équivalent de 700 tonnes de CO₂ sur l’année 2024. Le recours à des trajets déjà prévus permet de limiter la création de flux spécifiques. Yper affirme également que son modèle contribue à une augmentation de 50 % du panier moyen chez certains de ses partenaires.

Pour Jonathan Brouard, directeur commercial de l’entreprise, la croissance repose sur une capacité d’adaptation aux différents types de commerces : « Nous proposons une solution mutualisée qui s’adapte aux besoins locaux. Nous avons développé des partenariats solides dans la grande distribution, mais aussi dans des secteurs de niche comme les fleuristes ou les cavistes. »

Stratégie de diversification sectorielle

Après s’être concentrée sur la grande distribution, Yper diversifie son portefeuille d’activités. Elle développe désormais des partenariats dans les domaines de la parapharmacie, du pressing, de l’équipement sportif — notamment avec Décathlon — et de l’électroménager. Cette stratégie vise à élargir le champ d’action de la cotransportation au-delà des seuls produits de grande consommation.

L’entreprise table sur une adaptation du modèle aux spécificités logistiques de chaque secteur. Dans certains cas, la cotransportation permet d’éviter la mise en place de solutions de livraison coûteuses pour des volumes intermédiaires.

Le marché de la livraison du dernier kilomètre est en croissance. Selon plusieurs estimations, il pourrait atteindre 364 milliards de dollars à l’horizon 2034. Yper suit de près les innovations susceptibles de renforcer l’efficacité de son modèle : véhicules électriques, planification algorithmique des itinéraires, emballages durables. À ce stade, l’entreprise privilégie l’optimisation des ressources existantes à l’introduction de technologies lourdes.

Un modèle collaboratif soumis à plusieurs conditions

Le modèle d’Yper repose sur une logique d’économie collaborative, qui cherche à mutualiser les ressources sans créer d’infrastructure dédiée. Ce type d’approche permet de limiter les coûts fixes et les externalités négatives, mais il comporte des limites. Parmi elles : la dépendance à l’engagement volontaire, la fluctuation de la disponibilité des cotransporteurs, et le respect du cadre réglementaire sur le travail non salarié.

Par ailleurs, certains effets rebonds peuvent apparaître, en particulier si la facilitation des livraisons entraîne une augmentation de la consommation ou un déplacement des flux vers des zones auparavant peu concernées.


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